Par Bérangère Lepetit – 03/02/2019.
Un employé de la plateforme de Douai (Nord) a été
renvoyé pour avoir soutenu les Gilets jaunes. LP / Arnaud Dumontier
Trois employés ont récemment été licenciés pour «faute
grave» par le géant du commerce en ligne.
La raison ?
Avoir, sur les
réseaux sociaux, soutenu des actions ou tenu des propos contre leur employeur.
L’un a eu cette petite phrase, en forme d’encouragement :
« Franchement, vous
gérez, les gens, ne lâchez rien ! ».
L’autre a fixé rendez-vous à ses collègues à l’aube
devant la porte de son lieu de travail pour partir bloquer un entrepôt voisin,
à Lesquin (Nord).
Un troisième, enfin, a lancé à la cantonade : « il faut du renfort et des palettes, les
amis ! ».
Philippe, Lionel ou encore Sylvain*, trois salariés âgés
d’une vingtaine d’années et employés sur les plates-formes
logistique d’Amazon à Montélimar (Drôme) ou encore Lauwin-Planque près de
Douai (Nord) ont été un peu trop bavards ces dernières semaines sur leur compte
Facebook.
Le tort de ces trois hommes, ouvertement « pro-Gilets
jaunes » ?
Avoir tenu des propos « d’une singulière gravité […] en
opposition totale aux valeurs de l’entreprise », avoir manqué, également, à
leur « obligation de loyauté », peut-on lire sur les lettres de licenciement
pour faute grave, que nous nous sommes procurées, envoyées par le
géant du commerce en ligne depuis un mois
Dans ces
entrepôts, qui emploient quelque 3 000 salariés chargés de remplir les paquets
de la firme américaine avant qu’ils soient expédiés partout en France, ces
licenciements en série ont provoqué un émoi.
Deux débrayages ont été organisés en soutien à l’un de
ces hommes la semaine dernière sur le site de Montélimar (Drôme), tandis qu’un
appel à la grève a été lancé pour mardi par les syndicats Sud-Solidaires, CGT
et les Gilets jaunes Hauts-de-France et Drôme.
Peu probable que
la justice leur donne gain de cause
« Chez Amazon, la majorité des collègues sont
sympathisants des Gilets Jaunes, quelques-uns sont activistes, assure Habib
Latreche, représentant syndical (CGT) sur le site de Douai.
La direction a pris la décision de les licencier pour en
faire des cas exemplaires et dissuader les autres d’agir », poursuit le
syndicaliste qui demande la « réintégration » des salariés licenciés.
D’après Guillaume Reynaud, représentant syndical CGT à
Montélimar, l’un de ces ex-salariés, au moins, aurait désormais l’intention de
faire appel au tribunal des prud’hommes pour contester son licenciement.
Il semble néanmoins peu probable, au regard du droit,
qu’ils obtiennent gain de cause devant la justice.
« Ce sont des prises de position publique.
A partir du moment où le message est posté sur le réseau
social et peut être consulté par tous, il n’y a pas de violation du secret des
correspondances de la part de l’employeur », fait savoir Me Avi Bitton, avocat
spécialisé en droit du travail.
Le salarié peut se défendre en plaidant la bonne fois, en
expliquant, par exemple, qu’il ne pensait pas que l’action envisagée serait un
blocage », assure-t-il.
Reste que, le salarié est soumis à une obligation de
loyauté envers son employeur.
Il peut être sanctionné si son comportement nuit à son
entreprise.
Ce qui peut se traduire par l’obligation de ne pas
dénigrer son employeur.
Contacté, le groupe Amazon, qui reconnaît avoir envoyé «
une dizaine de notifications » à des salariés sur ses différents sites en
France, persiste et signe. « Ces
personnes ont été licenciées car elles n’ont pas respecté leurs obligations
contractuelles, soutient, laconique, une porte-parole du géant américain. Mais
elles sont libres de leur opinion politique », assure-t-elle, se défendant
de toute « chasse aux Gilets jaunes ».
* Les prénoms ont été modifiés
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