samedi 26 janvier 2019

Syndrome d'Alice au pays des merveilles

Patient hors norme : il voit les icônes sortir de l'écran de l'ordinateur !
Par Marie-Céline Ray - 25/01/2019.

En Italie, un homme de 54 ans a vu pendant une dizaine de minutes des icônes sortir de l'écran de son ordinateur et flotter sous ses yeux.
Les médecins lui ont diagnostiqué un « syndrome d'Alice au pays des merveilles ». La tumeur au cerveau, responsable de ces symptômes inhabituels, lui a été retirée.

Frontispice d’Alice au pays des merveilles, par John Tenniel.

Cet homme de 54 ans a vécu une expérience bien étrange : il a vu les icônes du bureau de son écran d'ordinateur sauter lentement en-dehors du moniteur et flotter entre lui et l'écran.
Elles avançaient, reculaient, puis, finalement, elles ont disparu de son champ de vision, en se déplaçant vers la droite.
Cette hallucination a duré une dizaine de minutes.

Dans le roman de Lewis Caroll, Alice change souvent de taille. © John Tenniel, Lewis Caroll, Wikimedia Commons, Domaine public

Ensuite, le patient a eu d'autres symptômes : des maux de tête, des nausées et une grande sensibilité à la lumière, ou photophobie.
Il s'est rendu aux urgences où les médecins lui ont diagnostiqué un syndrome d'Alice aux pays des merveilles. Ce cas est décrit dans un article de la revue Neurocase, rédigé par des chercheurs de l'université de Rome.

Les auteurs expliquent que les patients souffrant du syndrome d'Alice au pays des merveilles ont une « perception erronée de leur propre corps, affectant, à la fois, la taille et la position dans l'espace, ainsi qu'une altération de l'environnement. »

Typiquement, ces patients perçoivent des parties de leur corps comme étant bien plus grandes ou bien plus petites que la réalité.
Ils peuvent aussi voir des objets ou des personnes plus grandes ou plus petites, plus proches ou plus éloignées qu'elles ne le sont réellement.

Le syndrome d'Alice au pays des merveilles a été décrit par un psychiatre anglais, John Todd, dans les années 1950. Il a été nommé ainsi en raison des expériences que vit Alice dans l'ouvrage de Lewis Caroll, où elle voit sa taille se modifier.
De plus, Lewis Caroll souffrait lui-même de migraines, avec des manifestations visuelles.

Une tumeur au cerveau à l'origine de ce syndrome

Souvent, le syndrome d'Alice au pays des merveilles est causé par l'épilepsie, une intoxication aux médicaments, la migraine, des maladies psychiatriques, des infections.
Mais, ici, la cause semblait différente. Le patient avait des antécédents familiaux de tumeur au cerveau. Son électroencéphalogramme était normal, de même que ses analyses de sang et de fluide cérébro-spinal. Il souffrait de migraines mais pas avec aura.

IRM cérébrale avec injection de produit de contraste, coupe sagittale, glioblastome multiforme chez un enfant de 15 ans.

Le saviez-vous ?

Une migraine avec aura se caractérise par des symptômes souvent visuels qui précèdent le mal de tête. Par exemple, le patient voit des taches, des points lumineux, colorés, ou bien une partie de son champ visuel disparaît.

Une IRM a révélé que le patient avait une lésion d'environ 2,5 cm au niveau du cortex occipito-temporal de l'hémisphère gauche, une région impliquée dans la perception visuelle.
C'était un glioblastome, une tumeur cérébrale dont l'évolution est souvent rapide. La tumeur a été retirée par une chirurgie au laser, puis le patient a suivi une chimiothérapie et une radiothérapie.

Un an plus tard, il est retourné à l'hôpital pour une nouvelle opération car la tumeur était revenue au même endroit.
Le traitement semble avoir fonctionné car, 20 mois après l'épisode d'Alice au pays des merveilles, il allait bien et ne présentait plus de signe de maladie.

Il n'a pas connu d'autres hallucinations après le retrait de sa tumeur.

Pour en savoir plus le syndrome d'Alice au pays des merveilles, vous pouvez écouter un podcast qui lui est consacré sur le site de The Conversation.

CE QU'IL FAUT RETENIR

Un homme de 54 ans a vu les icônes de son bureau sortir de l’écran de son ordinateur et bouger devant lui.

Les médecins italiens lui ont diagnostiqué un syndrome d’Alice au pays des merveilles.

Les patients touchés par ce syndrome ont une modification de la perception de leur corps, des objets ou des personnes qu’ils voient.
La tumeur cérébrale qui a provoqué ces symptômes a été retirée et le patient va bien.   





182 terroristes ont été libérés en Belgique

182 terroristes et détenus radicalisés ont été libérés en Belgique.
25/01/2019.

Actuellement, 230 terroristes ou condamnés pour des faits de terrorisme sont incarcérés en Belgique.


Quelque 182 terroristes, complices de terroristes, prédicateurs de haine et personnes radicalisées qui avaient été condamnés depuis la poussée de l’Etat islamique et le début de la guerre en Syrie en 2011 ont été libérés.

Ces chiffres ont été demandés au ministre de la Justice Koen Geens (CD&V) par la députée sp.a Annick Lambrecht et sont relayés vendredi par De Tijd.

La plupart (74) sont des personnes qui figurent dans la base de données de terrorisme et que les services de renseignement devront suivre en priorité.

Actuellement, 230 terroristes ou condamnés pour des faits de terrorisme sont incarcérés en Belgique.
Vingt-quatre d’entre eux sont détenus dans les ailes ultra-sécurisées Reradex à Hasselt et à Ittre.
…..
L’attentat de Liège a mis en avant la radicalisation en prison.
Par Ludivine Ponciau - 11/06/2018

Qui sont les détenus les plus « à risque », comment sont-ils approchés par les recruteurs et, surtout, pourquoi le système carcéral ne parvient-il pas à prévenir la radicalisation intra muros ? – Reporters

Problème insoluble ?
Des acteurs de première ligne décrivent les mécanismes de l’embrigadement, vu de l’intérieur.
Et proposent des solutions.

Benjamin Herman, l’auteur des attaques du 29 mai qui ont coûté la vie à quatre personnes, s’est radicalisé ces dernières années au contact de plusieurs islamistes dans différents établissements pénitentiaires.
Sans que personne, ou presque, ne décèle les prémices de son basculement et le risque que sa libération représentait pour la société.

Des contacts multipliés avec des détenus radicalisés, c’est pourtant ce que mentionnait un rapport alarmiste dressé par le personnel de la prison de Marche-en-Famenne la veille de sa sortie.

C’est aussi ce qu’on pouvait lire entre les lignes de deux précédents rapports dans lesquels le nom du Rochefortois figurait.
Pas à titre principal, c’est vrai.
…………
Dans les prisons belges, 237 détenus sont suivis par la «cellule extrémisme»
Par Belga - 15/03/2018.

Une cellule créée en 2015, suite aux attentats de Paris et avant ceux de Bruxelles.

Parmi les personnes incarcérées en Belgique, 237 sont actuellement suivies par la «cellule extrémisme», créée en 2015 au sein de l’administration pénitentiaire. Il s’agit des personnes condamnées, en détention préventive ou internées à la suite de faits en lien avec le terrorisme, mais aussi des prisonniers connus pour leur radicalisation religieuse, bien que celle-ci ne soit pas la cause de leur séjour derrière les barreaux.

Seuls ceux considérés comme les plus influents, soit 22 à ce jour, sont écroués dans des sections spécialisées.

La grande majorité des détenus ne sont pas radicalisés sur le plan religieux.
La prison, on le sait, est néanmoins un terreau potentiel pour les idéologies extrémistes, comme le montre le passé de nombreux terroristes.

Pour éviter un effet boule de neige, le gouvernement fédéral a mis au point en 2015 un plan d’action contre la radicalisation en prison.

Profil régulièrement réévalué

Depuis ce plan, lancé après les attentats de Paris et avant ceux de Bruxelles, des agents de la Sûreté de l’Etat sont chargés spécifiquement de recueillir des informations sur la radicalisation en prison.
Sur la base de ces informations, du parcours juridictionnel des détenus, des observations dans les prisons elles-mêmes ou d’autres organismes, une liste d’individus à suivre est établie.
Elle comprend actuellement 237 noms dont la «cellule extrémisme» réévalue régulièrement le profil, selon l’administration pénitentiaire.

Ces personnes sont pour la plupart réparties dans les sections ordinaires des différentes prisons du pays.
Mais si on les suspecte de «contaminer» leur entourage, elles peuvent être placées dans un établissement doté d’« équipes satellites» composées notamment d’un assistant social et d’un psychologue qui offrent un suivi individuel renforcé (c’est le cas à Gand, Bruges, Saint-Gilles, Andenne et Lantin).

Pour les recruteurs jugés particulièrement dangereux, deux sections spécialisées dites «D-Rad:ex» ont été instaurées, à Hasselt et Ittre (dotées de 20 places chacune).
Les prisonniers y sont seuls en cellule, n’ont pas de contact avec les détenus des autres sections et subissent des contrôles plus fréquents qu’ailleurs.




jeudi 24 janvier 2019

La dé-consommation

Le spectre de la dé-consommation plane sur les commerçants
Par Philippe Bertrand - 20/01/2019.

Les blocages des « gilets jaunes » cachent une tendance plus profonde.
Procos, qui fédère 260 enseignes, note que la fréquentation des magasins baisse depuis 5 ans en continu.

Les commerçants réclament le gel des loyers que leur demandent les propriétaires de centres commerciaux. - 
ERIC PIERMONT/AFP

« Nous craignons une forme de 'suspension' de la consommation, un changement d'état d'esprit des Français ».

François Feijoo est le PDG des chaussures Eram.
Il préside aussi Procos, une fédération de 260 enseignes qui ont pignon sur rue et dans les centres commerciaux.
Il se demande si la France n'entre pas dans une ère de dé-consommation.

Procos a publié vendredi son bilan annuel.

Sans surprise, les sept samedis de blocage de la fin de l'année ont tiré les chiffres d'affaires vers le bas.
Le baromètre des ventes affichait -6,8 % en novembre et -3,9 % en décembre. Le prêt-à-porter (-4,9 %), la chaussure (-4,5 %), la beauté et la santé (-7,3 %) ont particulièrement souffert.


Pas de report avec Internet

La fréquentation des magasins a chuté de 3,1 % en décembre, notamment dans les villes de 500.000 à 1 million d'habitants, ces zones d'activité d'où est parti le mouvement  des « gilets jaunes », là où ceux qui se rendent à leur travail en voiture ont été pénalisés par la hausse du diesel.


La perte de clientèle a même atteint 26 % en novembre à Avignon Le Pontet, 18 % à Caen Mondeville 2 ou à la mégapole commerciale de Plan-de-Campagne près de Marseille.

« Ce qui nous a surpris, explique François Feijoo, c'est la courbe des ventes des sites Internet de nos enseignes.


Nous attendions une croissance de 14 %, conforme aux prévisions de la Fevad [la fédération du e-commerce, NDLR].
Les blocages auraient même dû gonfler ce chiffre.
Or la hausse n'a été que de 8,9 % en décembre.

Selon nos informations, les données que la Fevad publiera bientôt confirmeront que les Amazon et consorts n'ont pas profité de la crise.

Les fermetures ne sont plus taboues

Les statistiques de Procos montrent autre chose.
En décembre 2017 déjà, la fréquentation des magasins avait baissé de 1,4 %.

Le mouvement est en réalité enclenché depuis 5 ans :
-5,7 % en 2014,
-5,4 % en 2015,
-6,6 % en 2016.
L'année 2017 a suscité l'espoir d'une reprise avec un score de -2,5 %.
2018 a douché cette espérance.

Les commerçants ont demandé aux propriétaires de centres commerciaux l'étalement du paiement des loyers de novembre et décembre.

 Leur représentant demande plus aux grandes foncières.
« Le commerce doit se transformer pour garder ses clients.
Cette transformation, qui implique par exemple la digitalisation des boutiques, est coûteuse.
Les loyers ne peuvent continuer à augmenter comme si de rien n'était », affirme le président de Procos.
Il est bien placé au sein du groupe Eram pour savoir que les fermetures de points de vente ne sont plus taboues.


 La tendance à la dé-consommation affecte-t-elle toutes les formes de commerce ? 

L'institut Nielsen note que le 31 décembre a été pour les grandes surfaces alimentaires l'un des meilleurs jours de vente des deux dernières années avec 487 millions de chiffre d'affaires cumulé.


La société d'études IRI indique cependant que sur l'ensemble de décembre les ventes en volume des produits de grande consommation ont reculé de 2,3 %, avec des baisses encore plus fortes pour le champagne et le saumon.


L'année se termine à -0,8 % en nombre de produits vendus.
Le chiffre d'affaires du secteur progresse de 1,1 %.
Les Français achètent des produits de meilleure qualité dans les hypers et les supers.

Les modes de consommation sont bien en train de changer.
………………..

CONFÉRENCE 18 JANVIER 2019

Mouvement Gilets jaunes : premier bilan 2018 ; Les actions de Procos consécutives au mouvement des Gilets jaunes ; Conjoncture du commerce spécialisé : quel bilan pour 2018 ? ; 2019 de très nombreuses inconnues mais des signes encourageants ; Quels sont les enjeux majeurs pour les enseignes ? Immobilier de commerce en France : la loi Elan, un nouveau cadre réglementaire ; Immobilier de commerce en France : bilan et perspectives du marché ; les principaux dossiers du commerce... Lire le dossier (pdf)


PROCOS MOBILISE L’ÉCOSYSTÈME DU COMMERCE ET APPELLE À MODIFIER D’URGENCE LA FISCALITÉ POUR POURSUIVRE LA TRANSFORMATION DU RETAIL EN 2019

François FEIJOO, président de Procos et Emmanuel Le ROCH, délégué général ont fait un point complet sur la conjoncture 2018 et les perspectives 2019 pour le commerce spécialisé lors de la conférence de presse du 18 janvier 2019... Lire l'article complet (pdf)


CONJONCTURE DU COMMERCE SPÉCIALISÉ DÉCEMBRE ET ANNÉE 2018

2018, une activité impactée par plusieurs événements défavorables. Pour 2019, des raisons d’espérer...Lire l'article complet (pdf)


8 FÉVRIER 2019 - PETIT DÉJEUNER DIRIGEANTS DU RETAIL

Quels indicateurs pour piloter et animer l'équipe du magasin digitalisé ? En présense des représentants de Kéa & Partners et d'Undiz... Lire l'invitation (pdf)


LE COMMERCE EN 2019 : S’ADAPTER AU CONTEXTE !

Editorial par François FEIJOO, Président et  Emmanuel LE ROCH, Délégué Général de Procos...  Lire l'article complet (pdf)


2019 : UN MANQUE DE VISIBILITÉ, DES ENJEUX SOCIÉTAUX ET DES DOSSIERS IMPORTANTS POUR LE COMMERCE

L’actualité de l’environnement du commerce est très riche et peu lisible. Procos revient ici sur les impacts des Gilets Jaunes et les autres dossiers prioritaires : fiscalité du commerce, application de la loi Elan… Lire l'article complet (pdf)

 

« RÉINVENTER LE COMMERCE PHYSIQUE » ANDRÉ TORDJMAN, PRÉSIDENT DE LITTLE EXTRA, ADMINISTRATEUR DE PROCOS

Dans une tribune dans le Cercle sur les Echos.fr, André TORDJMAN explique que l’avenir du commerce physique passe par sa réinvention et pas seulement son ré-enchantement... Lire l'article complet (pdf)




mercredi 23 janvier 2019

l’affranchissement des serfs

23 janvier 1318 : le roi Philippe V affranchit les serfs de ses domaines.
Par La France pittoresque –

(D’après « Études sur l’histoire de l’humanité. La féodalité et l’Église » (par François Laurent) édition de 1865, « Cours d’économie politique ou Exposition des principes qui déterminent la prospérité
des nations » (par Jean-Baptiste Say) Tome 3 paru en 1823, « Précis chronologique, généalogique et anecdotique de l’Histoire de France » (par Gabriel Peignot) paru en 1815, « Coup d’oeil historique
sur la monarchie française et la liberté nationale » (par Charles de Montaigu) paru en 1844 et « Époques remarquables de l’Histoire de France, ou Morceaux extraits des historiens anciens et modernes » (par Masson, fils aîné) Tome 4 paru en 1822)

Cliquez sur l'image pour voir le diaporama


Louis X le Hutin (frère aîné de Philippe V) affranchissant les serfs en 1314.
Lithographie extraite d’une série sur les rois de France de 1890

Le même intérêt qui avait engagé les rois de France à favoriser la liberté des villes, les excita à seconder de tout leur pouvoir l’affranchissement : celui de réduire la puissance des barons féodaux, grands propriétaires tenant celle-ci de leur nombre de serfs.

Lorsque le pape Grégoire le Grand, vers la fin du VIe siècle, accorda la liberté à quelques-uns de ses esclaves, il en donna cette raison :

Le pape Grégoire Ier Saint de l'Église catholique
Grégoire Ier, dit le Grand, auteur des Dialogues (né vers 540, mort le 12 mars 604), devient le 64e pape en 590. Docteur de l'Église, il est l'un des quatre Pères de l'Église d'Occident, avec saint Ambroise, saint Augustin et saint Jérôme. Son influence durant le Moyen Âge fut considérable.

« Puisque notre Sauveur a bien voulu prendre la forme humaine, pour rompre, par sa grâce divine, les chaînes qui nous tenaient captifs, afin que nous fussions rendus à notre liberté primitive, c’est un œuvre salutaire de rendre, par la manumission, à des hommes que la nature a créés libres et qui ne se trouvent dans le joug de l’esclavage que par les lois des peuples, cette liberté dans laquelle ils étaient nés. »

C’est par une suite des mêmes idées, que plusieurs chartes d’affranchissement, antérieures au règne de Louis X — qui régna de 1314 à 1316 —, furent accordées « pour l’amour de Dieu et le salut de l’âme. »

Afin d'apaiser les nobles normands turbulents, Louis X leur confère plusieurs privilèges dans la Charte aux Normands, octroyée le 19 mars 1315. Miniature du xive siècle.
Louis X, dit « le Hutin » (c'est-à-dire « l'entêté »), né le 4 octobre 1289 à Paris, mort le 5 juin 1316 à Vincennes, est roi de Navarre de 1305 à 1316 (sous le nom de Louis Ier) et roi de France de 1314 à 1316, douzième de la dynastie dite des Capétiens directs. Il est le fils aîné du roi de France Philippe IV le Bel et de la reine Jeanne Ire de Navarre.

La cérémonie de la manumission se faisait dans l’église, comme un acte solennel de religion.
La personne à qui on rendait la liberté était conduite autour du grand autel, tenant une torche ardente ; elle s’arrêtait ensuite à un des coins de l’autel, et là on prononçait les paroles solennelles qui conféraient la liberté.

L’affranchissement s’accordait fréquemment au lit de la mort, ou par testament. Comme les esprits des hommes sont dans ce moment plus disposés à des sentiments de piété et d’humanité, ces actes étaient le fruit de motifs religieux, et se faisaient pour le salut de l’âme.

L’esprit du système féodal n’était pas favorable à l’affranchissement.


Jean II adoubant des chevaliers, enluminure des xive / xve siècle, BnF.
La féodalité est un système politique, ayant notamment existé en Europe entre le xe siècle et le XIIe siècle, dans lequel l'autorité centrale s'associe avec les seigneurs locaux et ceux-ci avec leur population, selon un système complet d'obligations et de services.

Suivant une maxime généralement établie, il n’était pas permis à un vassal de diminuer la valeur d’un fief, au préjudice du seigneur de qui il l’avait reçu.

En conséquence, on ne regarda pas comme valide les affranchissements accordés par l’autorité du maître immédiat.
Il était donc nécessaire de remonter par toutes les gradations de la tenance féodale, jusqu’au roi.

Expansion de l'empire carolingien sous Charlemagne.

Une forme de procédure si longue et si embarrassée ne pouvait manquer de décourager la pratique des affranchissements.
Les esclaves domestiques durent souvent leur liberté à l’humanité ou à la bienfaisance des maîtres ; mais la condition des esclaves ou serfs attachés à la glèbe était beaucoup plus difficile à changer.

Nonobstant toutes les difficultés, le peuple des campagnes vint à recouvrer insensiblement sa liberté.
L’église de Rome réclame l’honneur d’y avoir beaucoup contribué, et il est constant que, dès le XIIe siècle, le pape Alexandre III publia une bulle pour l’affranchissement général des esclaves.

Le couronnement d'Alexandre III - épisodes de la vie du pape Alexandre III (pape).
Rolando Bandinelli, né vers 1105 à Sienne, il fut le 170e pape de l’Église catholique sous le nom d'Alexandre III à partir de 1159. Il est mort le 30 août 1181 à Civita Castellana.

Il semble cependant que ce fut plutôt une pieuse exhortation aux fidèles, qu’une loi qui entraîna de leur part une rigoureuse obéissance.
La servitude n’en subsista pas moins presque partout, pendant encore plusieurs siècles.

Dans une charte de Louis VII le Jeune de 1152, on lit « que la bonté divine, en créant tous les hommes et en leur donnant une origine commune, les a tous doués d’une certaine liberté naturelle, mais que plusieurs s’étant rendus coupables ont été privés de leur dignité et réduits en servitude » (Gurérard, Cartulaire de Notre-Dame).


Le roi Louis VII part en croisade.

Ce premier aveu de liberté, encore un peu timide, va gagner en force par l’établissement des communes au XIIe et XIIIe siècles.

En effet, le même intérêt qui avait engagé les rois de France à favoriser la liberté des villes, les excita aussi à seconder de tout leur pouvoir l’affranchissement des esclaves domestiques et laboureurs.

La puissance des barons féodaux, dont ils se servaient si souvent pour troubler l’ordre public, se fondait sur le nombre de leurs esclaves ; d’ailleurs ceux-ci dépendaient entièrement de leurs maîtres et ne tenaient par aucun lien direct à l’État.

Les trois états : ceux qui prient, ceux qui font la guerre, ceux qui travaillent la terre.

En conséquence, tout ce qui tendait à accélérer les progrès de la liberté individuelle tendait aussi à diminuer la puissance dangereuse des grands propriétaires, et à augmenter le nombre des citoyens et des défenseurs de l’ordre et de l’autorité royale.

Philippe V le Long

Il n’est donc pas étonnant de voir que tous les souverains ont embrassé la cause de la liberté personnelle des paysans, et qu’ils y ont contribué, chacun suivant le degré de puissance dont il jouissait, tantôt par leur exemple, tantôt par des exhortations, et quelquefois même par des ordres exprès.

Ainsi, au commencement du XIVe siècle, le comte de Valois, frère de Philippe le Bel, affranchit les habitants de son comté, au nom de l’égalité et de la liberté naturelles :
 « Comme créature humaine qui est formée à l’image de Notre Seigneur, doit généralement être franche par droit naturel, et en aucun pays cette naturelle liberté ou franchise par le joug de la servitude qui est tant haineuse, soit effacée ou obscurcie, que les hommes et les femmes qui habitent ces lieux et pays dessus dits (Valois, Alençon, Chartres et Anjou) en leur vivant son réputés ainsi comme morts, et à la fin de leur douloureuse et chétive vie si étroitement liés et démenés, que des biens que Dieu leur a prêtés en ce siècle, et qu’ils ont accrus par leur propre labour, et accrus et gardés par leur pourvoyance, ils ne peuvent en leur dernière volonté disposer ni ordonner, nous, mus de pitié, pour le remède et salut de notre âme, et pour considération d’humanité et de commun profit (...) Donnons et octroyons, etc. »

Assassinat de Wat Tyler par Walworth sous l'œil de Richard II, et le même Richard II s'adressant à la foule en lui mentant au sujet du meurtre. Wat Tyler revendiquait l'abolition du servage lors de la révolte des paysans, en Grande-Bretagne en 1381. Library Royal MS 18.E.i-ii f. 175

Un autre monument remarquable relatif à l’affranchissement des serfs est la célèbre ordonnance de Louis X le Hutin (1314-1316), confirmée le 23 janvier 1318 en ces termes par son frère le roi Philippe V :

« Nous considérant que nostre royaume est dit et nommé le royaume des Francs, et veuillans que la chose en vérité soit accordante au nom, et que la condition des gens amende de nous, en la venue de notre nouvel gouvernement (...)

Ordonnons que généralement par tout nostre royaume, de tout comme il puet [peut] appartenir à nous et à nos successeurs, teles servitudes soient rémanées à franchise à tous ceux qui de orine ou ancienneté, ou de nouvel par mariage, ou par résidence des lieux de la serve condition, sont incheus ou pourroit inchéir en lieu de servitudes, et diverses conditions, franchises soient données o [à] bonnes et convenables conditions. »

Ces édits furent exécutés sur-le-champ dans les domaines de la couronne.

Un grand nombre de nobles excités par l’exemple de leurs souverains, et surtout par l’appât des sommes considérables qu’ils pouvaient se procurer par les affranchissements, donnèrent la liberté à leurs esclaves.

Il n’y avait en effet alors que les bourgeois des villes qui vivaient librement, les habitants de la campagne étant serfs ; et quoiqu’il leur fût permis d’avoir la possession de quelques terres, et d’autres revenus, ils ne pouvaient ni s’établir dans un autre lieu, ni se marier sans le consentement de leurs seigneurs.


Paysans libres du XIVe siècle dansant autour d’un arbre de mai.
Chromolithographie de 1930 de J.-L. Bezon

Mais tous les seigneurs ne furent et ne pouvaient être aussi généreux que la couronne dans les affranchissements directs, cela se comprend : l’affranchissement des serfs diminuait la valeur de leur seigneurie ; en achetant leurs domaines ils avaient aussi acheté les serfs, et ces derniers composaient la plus grande partie du revenu, en raison des servitudes qu’ils devaient et des droits au paiement desquels ils étaient astreints.

Esclaves et serfs du sixième au douzième siècle : illustrations recueillies par H. de Vielcastel, de documents originaux dispersés dans les grandes bibliothèques européennes.

Si beaucoup de seigneurs affranchirent leurs serfs gratuitement, bon nombre d’autres moins riches se réservèrent, en prononçant l’affranchissement de leurs serfs, certaines redevances qui prirent le nom de cens, redevances, dîmes et corvées.

Cependant, longtemps après le règne de Louis X et de Philippe V, plusieurs nobles de France continuèrent de maintenir leur ancienne autorité sur leurs esclaves.
Il paraît même, par une ordonnance du fameux Bertrand Duguesclin, connétable de France, que la coutume d’affranchir les serfs était regardée comme une innovation pernicieuse.

Lorsque les serfs eurent été déclarés hommes libres, ils restèrent encore obligés de rendre certains services à leurs maîtres.

On les regardait toujours comme d’une condition différente de celle des autres sujets ; il ne leur était pas permis d’acheter des terres, ni de devenir membres d’une communauté située dans le territoire du manoir auquel ils avaient appartenu.


mardi 22 janvier 2019

Evasion fiscale

"En France, l'évasion fiscale c'est 100 milliards d'euros par an, le budget de l'Education"

Après deux années d'enquête, Yannick Kergoat et Denis Robert sortent un documentaire explosif sur l'évasion fiscale.


Entretien exclusif - Par Charlotte Cieslinski et Julien Bouisset – 22/01/2019.

Sept ans après les "Nouveaux Chiens de garde", coréalisé avec Gilles Balbastre, Yannick Kergoat s'attaque à la finance.

Cette fois, avec "la Très Grande Evasion" il s'allie au journaliste d'investigation Denis Robert (à l'origine du scandale Clearstream) pour réaliser un documentaire sur les Panama Papers, Paradise Papers et autres scandales d'évasion fiscale qui se succèdent depuis dix ans.


Explosif, le sujet résonne en bien des points avec la mobilisation des "gilets jaunes":


"Aujourd'hui, Emmanuel Macron organise un grand débat national, mais il y a une question qui n'est pas posée, et qui pour nous, résoudrait toutes les autres : qu'est-ce qu'on fait de l'évasion fiscale ?"

Après deux années d'enquête, Yannick Kergoat et Denis Robert se heurtent aujourd'hui à la frilosité des investisseurs.
Pour financer la fin de leur travail, ils lancent un appel à crowdfunding.

Entretien

"La Très Grande Evasion" représente déjà deux années d'enquête.

Richesses mal redistribuées, classes moyennes qui se paupérisent… A plusieurs égards, votre projet fait écho aux revendications des "gilets jaunes".
Vous ont-ils inspirés ?

Le mouvement des "gilets jaunes", et le fait qu'il mette vraiment au cœur la question de la justice fiscale, c'est pour nous un énorme encouragement.
Ça nous porte, ça nous engage.

Ça fait deux ans qu'on écrit ce film, donc il n'y a pas l'idée opportuniste de surfer sur un mouvement social, une revendication partagée. 

Le titre, "la Très Grande Evasion", est un clin d'œil au film, évidemment.
A l'initiative de ce projet, il y a le producteur Bertrand Faivre : un ami de longue date, qui a coproduit le dernier film de Denis Robert.

Il nous a réunis en pensant que la question de l'évasion fiscale est au cœur de nos vies de tous les jours.
On en entend parler, il y a des livres, des articles et des reportages télévisés sur le sujet.
Mais il n'y a pas un film, avec l'impact que ça peut avoir au cinéma, la capacité d'interpeller les gens.
Donc, on s'est mis au boulot. Il a déjà financé deux ans de travail, d'enquête, de recherches, d'écriture.

Dans "la Très Grande Evasion", vous projetez de revenir sur les Panama Papers, Paradise Papers et autres scandales financiers qui révèlent depuis dix ans l'ampleur de l'évasion fiscale en France.
Concrètement, ça représente quoi ?

Aujourd'hui, l'évasion fiscale, c'est 100 milliards d'euros, chaque année pour la France
100 milliards d'euros, c'est plus que le budget de l'Education nationale.
Le déficit budgétaire français, c'est 83 milliards d'euros

Ces chiffres ne sortent pas de nulle part, mais de nombreuses associations et de rapports parlementaires.
Ça recouvre des réalités et des dispositifs qui sont un peu différents et qu'on nuancera dans le film : tout un agrégat de situations et de techniques d'évasion ou d'optimisation fiscales.


On vit depuis au moins quinze ans sous le régime de politiques d'austérité.

On nous dit "il n'y a plus d'argent dans les caisses, il faut se serrer la ceinture", et le grand débat national organisé cette semaine, stipule noir sur blanc que l'alternative c'est soit augmenter les impôts, soit baisser les services publics.

Nous, on dit : il y a une alternative, rétablissons la justice fiscale.
Comme les "Nouveaux Chiens de garde" en son temps, ce documentaire sera ponctué d'archives télévisuelles.

En 2011, vous dénonciez la connivence entre le pouvoir et les "éditocrates".
Cette fois, qui souhaitez-vous pointer du doigt ?

Ceux qui fraudent sont ceux qui ont le bénéfice de la fraude.
Ceux pour lesquels c'est rentable de frauder, évidemment, ça ne sera pas le salarié qui s'apprête à être prélevé à la source.

Ce sont les grandes fortunes, les plus riches de la société... ceux qui ont intérêt à soustraire des sommes à l'impôt ! La responsabilité est essentiellement politique, à différents échelons : français, européen, international...

Une grande partie de l'optimisation agressive vient de la compétition que se mènent les pays européens entre eux.
Pourquoi les questions de fiscalité ne sont-elles pas mieux harmonisées ? 

Connivence, bienveillance… le personnel politique est-il complice de ces grands circuits d'évasion fiscale ?
Concrètement, à qui pensez-vous ?

Est-ce qu'il y a en France des hommes et des femmes politiques qui sont corrompus, en termes d'évasion fiscale ?
La réponse est oui.

 On a quand même eu un ministre du Budget qui pratiquait la fraude fiscale.

Est-ce que c'est la raison principale pour laquelle le problème perdure ?
Je ne pense pas.
Il va falloir comprendre et analyser cette impuissance politique.
Essayer de définir pourquoi depuis tant d'années, il n'y a pas réellement eu de politiques conséquentes sur la question.

Avec Denis Robert, on posera la question à ceux qui ont des réponses et des solutions à apporter.
On ne fait pas ce film pour donner notre opinion, mais pour aller à la rencontre de ceux qui sont bien plus spécialistes que nous sur ces questions.


Face aux difficultés rencontrées pour financer votre film, vous lancez un crowdfunding sur KisskissBankbank.
Comment expliquez-vous les réticences du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée) ou des autres ?

Le producteur a cette formule : "Jamais je n'ai eu de réponses aussi rapides, ça a été non tout de suite !". 
La difficulté de financer un film sur la fraude fiscale est quand même le signe qu'il va falloir beaucoup travailler... Et que le problème ne fait pas consensus du côté des élites.

La seule solution, c'était de demander aux gens directement et de leur dire "on a besoin de vous pour faire ce film, si vous croyez un peu à l'équipe qu'on forme, avec Denis, aidez-nous à le faire".  
Il faut d'abord comprendre qu'un film, ça coûte cher.
Il y a beaucoup de collaborateurs, des animations, des tournages, des voyages. Et ce même si, nous, comme auteurs-réalisateurs, on ne prend pas d'argent ou très peu. 
On est à l'abri des coups de pression car on est indépendants.
On n'appartient pas à un organe de presse, on n'est pas salariés à l'année d'une société de production, on n'a pas d'actionnaires, pas de directeurs, etc.

Ça nous met largement à l'abri et on est bien déterminés à faire ce qu'on veut faire.

Propos recueillis par Julien Bouisset et Charlotte Cieslinski

LE PRÉSIDENT DES ULTRA-RICHES

Michel PINÇON, Monique PINÇON-CHARLOT

Chronique du mépris de classe dans la politique d'Emmanuel Macron
Date de parution : 31/01/2019.

« Macron, c’est moi en mieux », confiait Nicolas Sarkozy en juin 2017.

En pire, rectifient Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot.

Huit ans après Le Président des riches, les sociologues de la grande bourgeoisie poursuivent leur travail d’enquête sur la dérive oligarchique du pouvoir en France.

EAN : 9782355221286   Façonnage normé : BROCHE Nombre de pages : 176  Format : 140 x 205 mm

Au-delà du mépris social évident dont témoignent les petites phrases du président sur « ceux qui ne sont rien », les auteurs documentent la réalité d’un projet politique profondément inégalitaire.

Loin d’avoir été un candidat hors système, Emmanuel Macron est un enfant du sérail, adoubé par les puissants, financé par de généreux donateurs, conseillé par des économistes libéraux.

Depuis son arrivée au palais, ce président mal élu a multiplié les cadeaux aux plus riches :
- suppression de l’ISF,
- flat tax sur les revenus du capital,
- suppression de l’exit tax, pérennisation du crédit d’impôt pour les entreprises…

 Autant de mesures en faveur des privilégiés qui coûtent un « pognon de dingue » alors même que les classes populaires paient la facture sur fond de privatisation plus ou moins rampante des services publics et de faux-semblant en matière de politique écologique.

Mettant en série les faits, arpentant les lieux du pouvoir, brossant le portrait de l’entourage, ce livre fait la chronique édifiante d’une guerre de classe menée depuis le cœur de ce qui s’apparente de plus en plus à une monarchie présidentielle.

BIOGRAPHIE
Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, sociologues, anciens directeurs de recherche au CNRS, ont entre autres publié Le Président des riches.
Enquête sur l’oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy (La Découverte, 2011), La Violence des riches.

Chronique d’une immense casse sociale (La Découverte, 2014), Sociologie de Paris (La Découverte, Repères, 2014), Sociologie de la bourgeoisie (La Découverte, Repères, 2016) et Tentative d’évasion (fiscale) (Zones, 2015).


Des enfants mal nourris…

Royaume-Uni : des enfants mal nourris…
Par Eleanor Busby − Le 11 janvier 2019 − Source The Independant

« Des enfants mal nourris fouillent dans les poubelles de l’école pour apaiser leur faim », déclare une directrice d’école

Des parents arrivent à l’école en larmes disant qu’ils n’ont aucun moyen de nourrir leurs enfants.
Les enfants arrivent à l’école tellement affamés qu’ils vont chercher de la nourriture dans les poubelles, explique la directrice d’école.



Siobhan Collingwood, directrice de l’école primaire de Morecambe Bay, dans le comté de Lancashire, a déclaré qu’un élève sur dix venait de familles qui ont recours aux banques alimentaires.

« Lorsque les enfants sont affamés, cela altère leur comportement et les rend complètement obsédés par la nourriture, ainsi nous avons des enfants qui vont voler des noyaux de fruits dans les poubelles », a déclaré la directrice.


S’exprimant à l’émission BBC-Breakfast, Siobhan Collingwood a déclaré : « Nous avons des enfants qui n’ont rien dans leur gamelle du déjeuner et qui font une fixation sur la nourriture ».

La directrice a ajouté qu’il y avait actuellement 35 enfants dans son école dont les familles sont aidées par des banques alimentaires, en ajoutant :
« Le nombre est probablement plus élevé, mais nous ne connaissons que ceux-là. »


En début de semaine, le Comité d’audit environnemental a présenté les chiffres de 2017 de l’UNICEF selon lesquels 19% des enfants britanniques de moins de 15 ans vivent avec des adultes qui ont du mal à se procurer de la nourriture.


Siobhan Collingwood a déclaré que la faim à laquelle sont confrontés les élèves « brisait le cœur » et ajouté qu’elle avait vu des parents arriver à l’école et fondre en larmes, affirmant qu’ils n’avaient pas les moyens de nourrir leurs enfants.

« Des familles me disent qu’elles se prêtent régulièrement de la nourriture, et mon expérience quotidienne me dit que c’est un problème qui s’aggrave de plus en plus », a-t-elle déclaré.

Siobhan Collingwood a affirmé qu’elle avait constaté davantage de problèmes depuis l’introduction du Crédit universel, [un système d’indemnisation unique qui regroupe et remplace une série d’indemnités sociales qui existaient auparavant – NdT].

Ses commentaires ont eu lieu après qu’un groupe de députés représentant plusieurs partis a appelé le gouvernement à nommer un « ministre de la faim » pour lutter contre « l’insécurité alimentaire » – en particulier parmi les jeunes enfants.

Eleanor Busby

Traduit par Alexandre, relu par Marie-José  pour le Saker Francophone
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source : The Independant (Royaume-Uni) 2012

Changement de Société remercie Maurice Lecomte, qui a traduit cet article.

Les preuves s’accumulent que des milliers d’enfants au Royaume-Uni ne reçoivent pas assez à manger – et les privations financières s’étendant, leur nombre augmente rapidement.

Chris a 10 ans. Lui et son frère sont si mal nourris que leurs peaux sont pâles et qu’ils ont des cernes sous leurs yeux.
Leurs frères aînés ont eu une telle mauvaise alimentation qu’ils ont perdu leurs dents d’adulte.

Ils vivent dans la sixième ville la plus riche du monde – Londres.
Ces garçons ne sont que quatre parmi les milliers d’enfants de Grande-Bretagne qui ont faim – victimes d’une «épidémie silencieuse», la malnutrition dans la capitale et au-delà.

Kids Company, qui prend en charge 17.000 enfants à Londres, a rapporté une augmentation spectaculaire du nombre d’enfants à venir à ses rendez-vous dans les centres, qui ne sont pas en recherche d’un abri ou de sécurité, mais de nourriture.

La situation se reflète à travers le pays.

À Barnsley, l’assistance aux enfants consiste en un travail avec les parents dans une lutte pour qu’ils gardent des produits de base tels que le lait, le pain et les pâtes dans leurs réserves.

A Bristol, un projet pour les jeunes qui visait à leur offrir un lieu de conseil et de soutien, a été transformé en un endroit où ils vont pour un repas de base.

FareShare, un organisme de bienfaisance qui redistribue les surplus alimentaires des supermarchés, dites soupes populaires, les auberges de jeunesse et les groupes communautaires ont du mal à satisfaire, avec leurs distributions, la demande des parents et des jeunes « désespérés ».

Depuis Octobre, 42 % des groupes avec lesquels il travaille ont à faire face à la demande croissante de denrées alimentaires.

Kids Company, fondée en 1996 pour apporter un soutien pratique, affectif et éducatif aux enfants les plus vulnérables de Londres, a vu des jeunes réduits aux vols à l’étalage, à la récupération dans les poubelles et à manger de la viande crue.
Chaque semaine, 70 nouveaux enfants visitent l’organisme de bienfaisance à la recherche d’un soutien et d’un repas, comparativement à 30 par semaine l’année dernière.

Beaucoup d’enfants souffrant de la faim sont issus de familles immigrées dont les parents ne sont pas admissibles à travailler ou à demander des prestations. Mais les parents qui travaillent et ceux vivant des aides de l’État sont également aux prises avec le coût de la vie qui monte en flèche et le marché de l’emploi qui stagne.

«Nous constatons effectivement que des parents responsables ne parviennent tout simplement pas à pouvoir se payer la nourriture pour la maisonnée »,

a déclaré Camila Batmanghelidjh, la fondatrice de Kids Company ;

«Les enfants n’ont pas de voix publique afin de pouvoir nous le dire. »

Le problème est peut-être encore plus visible dans les écoles.

Kids Company cite cinq écoles du centre de Londres, où selon les dires du personnel entre 70 et 80 % des élèves sont touchés par l’insécurité alimentaire – ils ne savent pas toujours s’il y aura de la nourriture à la maison pour le prochain repas.

Mais ce n’est pas seulement dans la capitale. Un sondage effectué en Février par Netmums, le plus grand forum web pour les parents, a constaté qu’une mère sur cinq saute régulièrement un repas pour que ses enfants puissent manger.

En attendant, c’est une évidence pour Trussell Trust qui soutient les banques alimentaires qui distribuent des repas à 120.000 personnes dans le pays, et qui suggère également que le problème est de plus en plus important.

Son président exécutif, Chris Mould, a dit qu’il y avait eu une « forte augmentation » de la demande dans les derniers mois – et que parmi ceux qui ont faim se trouvaient 36.000 enfants.
Même si le service est en pleine expansion, l’organisme de bienfaisance découvre de plus en plus de personnes souffrant de carence alimentaire, et doit de plus en plus ne compter que sur le secteur caritatif.

« Ce que nous avons vu suggère qu’il y a des milliers de personnes dans ce pays, qui souffrent de la faim – devant faire des choix difficiles entre, le carburant, se chauffer, le transport et la nourriture », a t-il dit.

« La pression s’exerce le plus durement sur les mères et les enfants. »

Pour ceux sur la ligne de front, le problème est clair.
« C’est un manque d’argent », a déclaré Charlotte Williams, qui dirige Station House, un groupe communautaire qui offre des services de garde d’enfants à Thurnscoe, près de Barnsley.

« Nous sommes vraiment dans une crise.

Des parents qui travaillent voient leurs heures amputées et beaucoup perdent leur emploi. Même lorsque les revenus sont stables, le coût de la vie – gaz, eau, vêtements – a augmenté au point que les gens sont obligés de serrer leur budget alimentaire pour se permettre de répondre à d’autres besoins essentiels.

La semaine prochaine cela sera encore pire, lorsque les crédits d’impôt aux salariés seront supprimés.

« Cette semaine, nous avons donné des fruits frais, et les parents nous ont dit que c’était un grand jour – qu’ils n’en avaient pas eu depuis longtemps. »

« Barnsley est un endroit où on est fiers.
Les parents ne veulent pas admettre qu’ils ne peuvent pas acheter de la nourriture, mais quand on voit leur réaction quand il arrive que nous ne pouvons pas donner quelque chose qui nous est demandé, vous pouvez en déduire tout de suite quelle est la situation à la maison.

La première question que les enfants posent quand ils arrivent devant la porte est – avez-vous de la nourriture ? »

La School Food Trust, qui conseille le gouvernement sur la nutrition des enfants, a déclaré que pour « beaucoup trop d’enfants », le repas gratuit à l’école était leur seul repas convenable de la journée.

« Les enseignants signalent souvent que les enfants qui sont venus à l’école sont trop affamés pour apprendre, et sont dans la crainte quant à savoir s’ils vont pouvoir manger dans la soirée quand ils rentrent de l’école, » indique une porte-parole.

Dans le même temps où la demande aux organismes de bienfaisance alimentaire de première ligne est en hausse, leur financement est compressé.

Dans un sondage de l’an dernier, FareShare constatait qu’un organisme de bienfaisance sur trois avec lesquels il travaille était en proie à des réductions de financement gouvernemental ; les deux tiers de la réduction pour rester à flot, a affecté les budgets alimentaires.

Le problème de carence alimentaire de l’enfant est le pire qu’on ait pu connaître, même dans l’expérience d’éducateurs chevronnés tels que Mme Batmanghelidjh.

« Un grand nombre d’organismes qui pourraient aider sont à court de financement, et sont obligés de garder leur porte fermée ou de restreindre leur activité », dit-elle.

« Je fais ce travail de rue depuis 21 ans.
Depuis une année et demi, le manque de nourriture est devenu un problème beaucoup plus répandu que celui que nous connaissions auparavant. Je sais qu’un collectif de parents pratique du vol à l’étalage pour nourrir leurs enfants. »

Cette semaine, Kids Company lance son opération « Promesse d’Assiette » pour alerter concernant l’insécurité alimentaire, la faim et la malnutrition parmi les enfants.
Pour soutenir l’appel, rendez-vous www.kidscoplatepledge.org
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Reportage additionnel

par Aaron Lee, Olivia Lee et Raziye Akkoc

Études de cas : les enfants affamés

Kids Company a partagé les histoires de quelques uns des affamés de Londres. Leurs noms ont été changés et parce que les jeunes enfants ont du mal à articuler leur expérience, deux jeunes adultes ont été invités à rappeler ce qu’a été leur jeunesse, avec la peur et la faim.

Chris, 10 ans : «La seule nourriture que l’on nous a donnée a été celle à bon marché, frite, des aliments transformés »

Chris et son frère montrent des signes de malnutrition extrême avec la peau pâle et des cernes sous leurs yeux.
Leurs deux frères aînés ont perdu leurs quatre dents d’adulte de devant et leur frère de deux ans a perdu ses dents de lait prématurément.

Leur père alcoolique a quitté leur mère il y a deux ans.
Lorsque les travailleurs sociaux ont découvert la maison de Chris, la seule nourriture que les enfants aient reçue avait été celle à bon marché, frite, des aliments industriels transformés.
Les enfants sont extrêmement méfiants et ont été victimes d’intimidation à l’école.

L’axe social principal de travail avec Chris a été de le prendre maintenant à l’école tous les jours et de manger un repas sain avec lui dans un des centres de Kids Company. Maintenant, il perd moins son sang-froid, il est plus confiant.

Amy, 20 ans : « J’avais tellement faim que je mangeais les éclats de brique du mur »

« Quand j’étais petite, j’étais très maigre et j’en ais été très embarrassée.
J’avais développé un mal de ventre qui se rattachait à mon alimentation et au stress, qui je crois était quelque chose que j’ai hérité du stress de ma mère relatif à la crainte de ne pas avoir assez de nourriture.

La faim me réveillait dans la nuit, mais il n’y avait rien à manger.
Quand il m’arrivait d’aller chez des gens, les parents me faisaient autant de nourriture que possible et m’en donnaient pour moi à la maison.

Chez mon meilleur ami je faisais le plein de biscuits pour chiens entre les repas. Je me postais à la clôture du jardin et demandait aux passants des sucreries ou des aliments.
Je grattais même le mur pour provoquer des éclats de briques et mangeais ceux-ci.
Quand j’ai vécu seule dans les rues, je passais des jours à marcher autour de Londres, en espérant me trouver en mesure de découvrir ou voler de la nourriture.
Je regardais dans toutes les poubelles et dans tous les recoins du sol. »

Joe, 20 ans : « Je pouvais à peine manger – mon estomac étant tellement rétréci, mes côtes saillaient »

« J’avais neuf ans lorsque j’ai été arrêté pour avoir volé dans un supermarché. J’avais tenté de prendre les aliments pour bébé pour ma sœur.
Quand je suis arrivé à la Kids Company, je parvenais à peine manger quelque nourriture que ce soit – mon estomac étant tellement rétréci-, et mes côtes saillaient.

Il m’a fallu environ huit mois pour parvenir à manger ce que je dois manger.

 Mais je suis arrivé à avoir un repas complet tous les jours.
Venir ici m’a rendu plus heureux, parce que je me trouve beaucoup moins stressé.
Pour la première fois, j’ai eu de la stabilité. J’ai été en mesure de mieux apprendre. J’ai pu faire beaucoup mieux les choses parce que n’étant pas tout le temps fatigué. »