Baya, de son vrai nom Fatma Haddad, épouse Mahieddine,
née le 12 décembre 1931, à Bordj el Kiffan (Fort-de-l'Eau, aux environs
d'Alger) et morte le 9 novembre 1998 à Blida, est une peintre algérienne, qui
ne signa jamais ses œuvres que de son seul prénom usuel.
Danseuses et musicienne, 1976 Gouache, 81.5 x 121 cm .
Gouache
Orpheline de ses deux parents, elle est recueillie par sa
grand-mère qu'elle aide dans son travail dans une ferme de colons
(horticulture).
En 1943, Marguerite Caminat, sœur de la propriétaire, la
prend chez elle à Alger pour rendre des services ménagers dans une maison dont
l'éblouissent les fleurs et les oiseaux.
Instruments de musique, 1985 Gouache et aquarelle sur
papier, 99 x 150 cm
Baya commence alors à modeler des personnages ou des
animaux fantastiques en argile et elle est encouragée à réaliser des gouaches
que le sculpteur Jean Peyrissac montre à Aimé Maeght, de passage à Alger en
1943.
Vidéo
En 1947, une exposition est organisée à Paris par Maeght
dans sa galerie.
André Breton préface le catalogue.
Elle connaît un
vif succès.
Musiciennes, 1975 - Gouache, 80,5 x 148,5 cm - Gouache
Le magazine Vogue publie la photo de Baya, qui n'a alors
que seize ans, avec un article d'Edmonde Charles-Roux.
Baya découvre Paris et rencontre le peintre Georges
Braque.
En 1949 elle réalise à Vallauris des sculptures en
céramique dans l'atelier Madoura et côtoie Picasso.
En 1953, Baya est "remise" à son tuteur, qui la
marie, comme seconde épouse, au musicien "arabo-andalou" El Hadj
Mahfoud Mahieddine, d'une trentaine d'années plus âgé qu'elle.
Femme et paon, 1969 Gouache et aquarelle sur papier, 116
x 91 cm
« Passé le bal irréel de Cendrillon », comme l'écrit
François Pouillon, Baya demeure durant dix ans dans l'impossibilité de
poursuivre son œuvre.
En 1963 Baya participe à l'exposition « Peintres
algériens » organisée pour les Fêtes du 1er novembre et préfacée par Jean Sénac
le musée d'Alger acquiert (gracieusement) et expose ses œuvres anciennes.
Sur l'amicale incitation de Mireille et Jean de
Maisonseul, conservateur du Musée, elle reprend ses pinceaux et ne cessera plus
de réaliser sur papier de grandes œuvres qui seront par la suite régulièrement
exposées en Algérie (Alger, Tizi Ouzou, Annaba), en France (Paris et
Marseille), en Belgique (Bruxelles) et dans le monde arabe.
Femme aux paons Gouache sur papier, 100 x 72,5 cm - Gouache
Plusieurs d'entre elles sont conservées dans la
Collection de l'art brut de Lausanne.
Baya est placée, avec Aksouh, Benanteur, Guermaz, Issiakhem, Bel Bahar, Khadda et Mesli, parmi les
artistes de la « génération de 1930 » (tous ces peintres étant nés autour de
cette année) qui, après les précurseurs des années 1920, ont été les fondateurs
de l'art pictural algérien moderne.
Un jour Baya fit sa première peinture celle-ci était
sublime.
L'œuvre
Dans ses gouaches, autour du rose indien, du bleu
turquoise, des émeraudes et violets profonds, un trait épuré, en marge de toute
géométrie figée, vient cerner sans hésitation ni repentir les silhouettes et
les coiffes de « Hautes Dames », figures de la Mère énigmatique, les motifs qui
recouvrent leurs robes, ceintures et foulards.
Musiciennes, 1976 Aquarelle gouachée, 96.5 x 148 cm –
Dans des compositions qui ne cessent de jouer sur de
fausses symétries, l'image se referme rigoureusement, à travers l'équilibre des
espaces et des tons, le dialogue sans fin des arabesques, sur un espace
autonome, résolument irréalisé.
Baya construit un univers clos, exclusivement féminin,
tout à la fois reclus et souverain.
Les objets qui entourent ces « Dames » se détachent, sans
nulle ombre, disposés les uns au-dessus des autres sur les différents registres
d'un unique plan dans une vision qui refuse toute perspective illusionniste.
Dès les premières gouaches de Baya apparaissent vases et
cruches, bouquets et fruits.
Deux décennies plus tard compotiers et coupes, au-delà
des pastèques et raisins, débordent d'une multitude de fruits et poissons
indistincts.
Posées sur tables ou étagères, lampes et lanternes les
accompagnent, et de nombreux instruments de musique, violes et violons,
cythares et mandores, luths, lyres et harpes.
Quand ses gouaches s'aventurent hors de l'intimité des
intérieurs, émergent des îles, cernées de poissons, peuplées de huttes serrées
les unes contre les autres et d'arbres où veillent de nombreux oiseaux.
L'exubérance de la forme et l'intensité de la couleur y
font remonter, notait le romancier Jean Pélégri «
à un temps antérieur à l'apparition de l'homme, où les choses et les créatures
étaient encore incertaines et encore mêlées, où les arbres poussaient sous les
eaux, où les poissons, avant de parvenir à leur état, habitaient les racines
des plantes et montaient dans leurs tiges ».
Jugements
« Je parle, non comme tant d'autres pour déplorer une fin
mais pour promouvoir un début et sur ce début Baya est reine.
Le début d'un âge d'émancipation et de concorde, en
rupture radicale avec le précédent et dont un des principaux leviers soit pour
l'homme l'imprégnation systématique, toujours plus grande, de la nature.(…)
Baya dont la mission est de recharger de sens ces beaux
mots nostalgiques:'l'Arabie heureuse'. Baya, qui tient et ranime le rameau
d'or. »
- André Breton, dans
Baya, Derrière le Miroir, Galerie Maeght, Paris, novembre 1947
« Baya est la sœur de Schéhérazade.
Schéhérazade, la tisserande des mots qui éloignent la
mort.
Schéhérazade,
cette autre femme qui fabule pour compenser sa réclusion.
Nous voici donc dans le conte, avec ses univers
merveilleux (titre d’une œuvre de 1968).
Baya abroge les formes, les classifications et les
dimensions : l’oiseau s’étire et devient serpent, arbres et cahutes poussent de
guingois, les vases se ramifient, deviennent arborescents comme des queues ou
des huppes d’oiseaux.
Dans cette sorte de village des origines où cases, arbres
et oiseaux sont emmêlés, les paysages et objets baignent dans l’informulé et la
liberté du monde placentaire.
Aucun centre de gravité n’est admis.
Tout l’effort de l’artiste est tendu vers la recherche
d’une sorte d’harmonie prénatale que la découverte du monde normé, balisé,
anguleux nous a fait perdre ».
- Tahar
Djaout, Schéhérazade aux oiseaux, dans Algérie-Actualité
no 1146, Alger, 1er -7 octobre 1987
Musées
Paris, Institut du monde
arabe : La Dame aux roses, 1966, gouache sur papier, 100 × 160 cm
Alger, Musée
national des beaux-arts d'Alger : Femme au palmier
Lausanne, Collection de l'art brut : sans titre, entre
1947 et 1953, gouache sur papier, 65 × 50 cm.
Bamako, Musée national
du Mali
Ambassade d'Algérie aux États-Unis
Bibliographie sélective
Document utilisé pour la rédaction de l’article : Source
utilisée pour la rédaction de l’article
Baya, Derrière
le Miroir, Galerie Maeght, Paris, novembre 1947. Document utilisé pour la
rédaction de l’article
Peintres algériens, préface non signée de Jean Sénac,
salle Ibn Khaldoun, Fêtes du 1er novembre, Alger, 1963 Document utilisé pour la
rédaction de l’article
Peintres algériens, textes d'Edmond Michelet et Mourad
Bourboune, Musée des arts décoratifs de Paris, Paris, 1964 Document utilisé
pour la rédaction de l’article
Baya, préface de Gaston Defferre, texte de Jean de Maisonseul,
Musée Cantini, Marseille, 1982. Document utilisé pour la rédaction de l’article
Algérie, Expressions multiples (Baya, M'hamed Issiakhem,
Mohammed Khadda), avant-propos de Henri Marchal, préface de Kateb Yacine, textes de Jean Pélégri, Jean de Maisonseul,
Benamar Mediene et Michel-Georges Bernard, Cahiers de l'ADEIAO no 5, Paris,
1987 (ISBN 290626704X). Document utilisé pour la rédaction de l’article
Baya, Éditions Bouchêne, Alger, 1988.
Trois femmes peintres, Baya, Chaïbia, Fahrelnissa,
Institut du monde arabe, Paris, 1992.
Les effets du voyage, 25 artistes algériens, (textes de Fatma Zohra Zamoum,
Ramon Tio Bellido, Michel-Georges Bernard et Malika Dorbani Bouabdellah),
Palais des Congrès et de la Culture, Le Mans, décembre 1995 (ISBN 2950969801).
Document utilisé pour la rédaction de l’article
Baya parmi nous, entretien avec Baya par Dalila Morsly,
textes d'André Breton, Jean de Maisonseul, Ali Silem, Hassen
Bouabdellah, Jean Pélégri, Djilali Kadid, Lucette Albaret, dans Algérie
Littérature/Action no 15-16, Marsa éditions, Paris, 1997. Document utilisé pour
la rédaction de l’article
Peintres
du Signe - Mesli,
Martinez, Baya, Khadda, Rachid Koraïchi,
Samta Ben Yahia, Silem,
Sergoua, Mohand, Yahiaoui, Tibouchi, textes de Pierre Gaudibert, Nourredine
Saadi, Michel-Georges Bernard et Nicole de Pontcharra), Fête de l’Humanité, La
Courneuve, septembre 1998 (exposition itinérante). Document utilisé pour la
rédaction de l’article
Baya, textes d'André Breton, Frank Maubert et Jean
Peyrissac, Maeght
éditeur, Paris, 1998.
Dalila Mahhamed-Orfali, Chefs-d'œuvre du Musée national
des beaux-arts d'Alger, Alger, 1999 (reproduction : Femme au palmier, 1946 no
63. Document utilisé pour la rédaction de l’article
Baya, textes de Lucette Albaret, Michel-Georges Bernard
et François Pouillon, Cahiers de l'ADEIAO no 16, Paris, 2000 (ISBN 2906267163).
Document utilisé pour la rédaction de l’article
Jean Sénac, Visages d'Algérie, Regards sur l'art, Paris,
Paris-Méditerranée / Alger, EDIF 2000, 2000 (p. 106-109; reproductions, p.
94-96) (ISBN 284272156X). Document utilisé pour la rédaction de l’article
Marion Vidal-Bué, L'Algérie des peintres 1830-1960, Paris
Alger, Paris-Méditerranée EDIF 2000, 2002 (ISBN 2842721438) (reproductions :
Deux femmes et enfant, 1947, p. 48; Grand vase aux poissons, 1967, p. 52)
Document utilisé pour la rédaction de l’article
Baya, avant-propos de Michèle Moutashar, textes de
Edmonde Charles-Roux, Michel-Georges Bernard, Lucette Albaret, Musée Réattu,
Arles, 2003. Document utilisé pour la rédaction de l’article
Tahar Djaout, Une mémoire mise en signes, Écrits sur
l'art, textes réunis par Michel-Georges Bernard, Préface de Hamid Nacer-Khodja,
El Kalima Éditions, Alger, 2013, 287 p.
Voir aussi
Article connexe
Peinture algérienne contemporaine
Liens externes
Baya à la
galerie Maeght [archive]
Baya au Musée des Beaux-Arts d'Alger, 2007 (nombreuses
images) [archive]
Baya dans les collections de l'Art brut, Lausanne
[archive]
Article sur Baya (5 images) [archive]
(en)
Algerian Bayah Mohie Eddine greatly admired in long artistic career, dans
Magharebia - The News & Views of the Maghreb, 1er septembre 2005 [archive]
Notes et références
↑ Anatole Jakovsky, Lexique des peintres naïfs du monde
entier, Basilius Presse, 1967 [1] [archive]
↑ « On s'extasie sur la spontanéité primitive de cet art,
on découvre avec un émerveillement non exempt de paternalisme, l'expression
naïve à l'état brut, vierge, sauvage enfin », Mohammed Khadda.
↑ L'exposition réunit des peintures d'Aksouh, Baya,
Hacène Benaboura, Benanteur, Bouzid, Guermaz, Issiakhem, Khadda, Azouaou
Mammeri, Mesli, Martinez, Mohamed Racim, Bachir Yellès, Zérarti, mais aussi
d'Angel Diaz-Ojeda, Jean de Maisonseul, Nallard et René Sintès, ainsi que des
dessins d'enfants.
https://expertise.aguttes.com/estimation-art-contemporain/mahieddine-baya/
https://www.culturealgerie.com/quand-google-rend-hommage-a-baya-mahieddine/
https://www.culturealgerie.com/quand-google-rend-hommage-a-baya-mahieddine/
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