lundi 31 décembre 2018

Solomon et Benalla

ALEXANDRE BENALLA PRIS EN MAIN PAR LE MOSSAD !
Par Jacques-Marie Bourget – 31/12/2018

Depuis qu’il a quitté l’Elysée – mais l’a-t-il vraiment quitté ?
– Alexandre Benalla est marqué à la culotte par le Mossad.

© Copyright 2018, L'Obs Alexandre Benalla. Image d'illustration.

Pourquoi diable ?
Tous les services secrets du monde, mais en particulier celui d’Israël, rêvent d’avoir sous la main un homme qui a partagé l’intimité des puissants.
C’est le cas de Benalla qui, pendant plus de dix-huit mois a vécu dans l’ombre du couple Macron et, à la fois, au cœur d’une machine pas banale, la Présidence de la République Française, cinquième puissance mondiale et membre du Conseil de Sécurité de l’ONU.

Quand Mitterrand est arrivé au pouvoir en 1981, même si Tonton et ses amis, depuis longtemps, avaient épuré toutes les archives concernant leur maître, le Mossad avait, lui, récupéré des kilos de papiers.

Pas tous valorisants pour l’histoire secrète de celui qui arrivait au pouvoir.
Vichy, bien sûr. Mais pas seulement.
Et ce n’est pas pour le seul amour de la carpe farcie que Mitterrand a réservé sa première visite d’Etat à Israël.

Ce Benalla, et ses secrets même petits, n’a donc pas de prix.
Et le Mossad, prêt à guider le demandeur d’emploi, est informé de tout ce qui tourne autour de cet Alexandre.

Les dirigeants tunisiens cèdent l’exploration et l’exploitation de la richesse du sous-sol à un escroc israélien.
24 FÉVRIER 2010

Et c’est un agent israélien, travaillant sous couverture dans un aéroport parisien, qui a été le premier informé d’un transfert de 294 000 euros touchant le gendarme Vincent Crase, ami et complice de Benalla, un argent issue des comptes d’oligarques caucasiens.

Philippe Hababou Solomon, le mentor d'Alexandre Benalla. (DR)

Mieux, le même observateur croit savoir aujourd’hui qu’une autre somme, cette fois de 600 000 euros, venue de la même source, est arrivée sur des comptes au Maroc.
Rien ne dit que cet somme soit destinée, de près ou de loin, au chômeur de l’Elysée.
Mais autour du malheureux Benalla, l’argent circule.

Enfin, les israéliens ont fait « tamponner » Benalla par un de leurs amis, agents, correspondants, l’incroyable Philippe Habadou Solomon.


Le genre d’homme que le Mossad adore.
Il suffit de le sonner, il est prêt à donner la main même si la prison est au bout.

Cette fois Solomon, lui aussi doté d’un passeport diplomatique, a accepté, pour le compte du Mossad, de jouer les parrains de Benalla.

L’Afrique étant un vieux terrain de jeu des ambitions d’Israël, hors même le commerce du diamant, la carrière de la jeune recrue devait commencer par la tournée des petits ducs.
Ces corrompus et potentats qui étranglent les peuples de tout un continent.

L’autre cour de récréation, bien plus petite où il doit être amené à jouer, c’est l’émirat totalitaire et esclavagiste du Qatar.
Allez savoir comment, la diplomatie israélienne laisse, à Doha, ce Solomon jouer un rôle d’ambassadeur occulte…
Benalla pourra toujours s’y occuper des footballeurs du Mondial de la honte, en 2022.

Une chose acquise, le tricotage de certains journalistes « investigateurs » parisiens qui entendaient désigner Alexandre Djouhri comme nouveau coach ou apporteur d’affaires de Benalla sont allés dans le mur.
En réalité, pour révéler un secret d’état, les deux Alexandre se sont croisés au « Zuma », un restaurant japonais de Londres, la cantine d’un Djouhri gravement cardiaque et condamné aux sushis.

Sachant que l’ami de Dominique de Villepin déjeune ici chaque jour, Benalla (qui vit à Londres) a un jour réservé une table au « Zuma » pour, enfin, rencontrer l’homme dont la presse affirme « qu’ils se connaissent ».
C’est en allant se laver les mains que Djouhri est tombé sur le chômeur de l’Elysée…

Puisque nous sommes en période de fête, et que les soirées peuvent être longues -et parfois tristes-, nous vous soumettons, comme un bonus, un résumé de la carrière du nouveau « papa » de Benallla.
Rassurons-nous, le disciple est à bonne école. Etonnant que, pris d’une crise de pudeur subite, « Le Monde » se soit limité à présenter le gourou de l’ex « épaule gauche » de Macron comme rien de plus « qu’un ancien conseiller de l’ancien président d’Afrique du Sud »…
Il est pourtant plus et pire que cela.

En 1990 Philippe Habadou Solomon, quarantaine bien mise, tient commerce de joaillerie place Vendôme à Paris.
Mais tout le monde n’est pas Van Cleef et la boutique fait pschitt.

Peu soucieux d’assurer le service après faillite, Solomon part aux Etats Unis alors que la France va le condamner pour la légèreté de sa gestion bijoutière.
Il a confiance en son avocat, Thierry Herzog, le conseiller de Sarkozy.
« Attention, je ne connais pas Sarkozy, on a juste passé des vacances avec lui et Herzog en 2001 », précise Solomon aux journalistes qui le questionnent alors.

Aux Etats-Unis, Solomon se recycle dans la gestion financière.
Bavure, il abonde largement la campagne électorale de Robert Toricelli, un sénateur proche de Clinton.
Plus tard le néo homme d’affaires va le reconnaitre : « cette mise de fonds politique était illégale ».
Il est arrêté alors qu’il joue au casino « Taj Mahal » d’Atlantic City. C’est la prison.

Quand il la quitte, il s’installe en Israël, Tel Aviv devient sa résidence officielle.

Au passage il se lance dans une opération de sauvetage de Bernard Tapie « un mec bien ».
Mais voilà que Brice Hortefeux, grand expert dans la définition des hommes que l’on peut fréquenter, ou pas, conseille à « Nanard » de « s’éloigner de Philippe ».
Ah bon ! Pourquoi ?

Heureusement il y a « Popaul ».
L’insubmersible Barril qui, lui aussi expert en honnêtes gens, « tamponne » Solomon pour « l’aider sur la sécurité en Centrafrique alors que je n’y connais rien ! ».

L’excellent Philippe débarque à Bangui en compagnie de deux hommes vertueux, Lotfi Belhadj et Christophe Giovanetti.
Franco-tunisien, Belhadj a de l’entregent puisqu’il est à la fois entrepreneur et diplômé de l’Institut d’Etudes Islamiques de Paris (aujourd’hui il est l’organisateur de la défense de Tariq Ramadan).

Giovanetti n’est pas un inconnu puisqu’il a, sous Chirac, organisé un arbre de Noël à l’Elysée et réalisé le logo de l’opération « Pièces jaunes » de Bernadette.
L’affaire de sécurité ne se fait pas, mais Barril le branche sur le rachat de la compagnie aérienne Aerolyon.

En France, en 2002, il reprend donc cette société de transport aérien.
Neuf mois plus tard les ailes déposent le bilan et Solomon est mis en examen pour « faux, usages de faux et escroquerie ».

Un peu tard la justice découvre que pour acquérir la société, « le Roi Solomon » a produit de fausses attestations.
Deux documents attestant du dépôt de 8,2 millions d’euros en garantie, des papiers bidons produits devant le Tribunal de commerce.

D’un tribunal l’autre Solomon passe du commerce au correctionnel.
En 2004 le TGI de Lyon condamne Philippe Hababou, alias Philippe Solomon, à trois ans de prison ferme.
Le bienheureux sort en 2005, laissant 254 salariés au tapis.

Bijoutier, homme de sécurité, aviateur… Rien ne marche trop bien.
Alors pourquoi pas le foot, un monde bienveillant avec les porteurs de casiers.

Immanquable, Solomon devient l’ami d’Arcadi Gaydamak, un oligarque russo-israélien intime de la bande à Pasqua, héros de « l’Angolagate », qui va, comme c’est étrange, passer un peu plus tard une longue année à Fleury-Mérogis.

Pour l’instant Aracadi et Philippe décident d’installer le footballeur Luis Fernandez comme entraineur à la tête du club israélien Bétar.
Solomon a joué les agents recruteurs :
« Je connaissais l’agent Jean-Luc Baresi, grâce à Bernard (Tapie) ».
Baresi ? «Un mec bien, ferait pas de mal à une mouche ».
C’est vrai que lorsqu’on a deux frères fichés au grand banditisme et que, soi-même, on a été incarcéré pour « tentative de racket et menace de mort », on est forcément un type au poil.

Finalement, le foot, ce n’est pas ça non plus.
Pourquoi ne pas essayer le pétrole ?

Ca tombe à pic puisque Solomon tombe sur l’admirable docteur Huu un vietnamien qui, depuis sa terre natale, tente de mettre son nez dans différents marchés de ce brut qui sent mauvais.
Mais, pour vendre « l’oil » providentielle, Huu n’est installé que sur son marché national.
C’est peu. Pourquoi ne pas faire mieux et, aussi, vendre du pétrole en Afrique ?

Philippe Habadou Solomon est bien d’accord :
« Il n’était présent qu’au Vietnam, je me suis dit qu’il fallait développer tout ça ». C’est vrai que le « tout ça » est une spécialité de notre héros.
Sort favorable puisque « Nanard », présente à son pote de prison, un spécialiste, « Loïk », Le Floch-Prigent, l’ancien PDG d’ELF.
Avec sa belle équipe, Le Floch, Giovanetti et Belhadj, Solomon s’occupe donc du développement d’ATI, la boîte du docteur Huu.
Avec Huu ça avance vite, les bonnes nouvelles s’accumulent.

Les contrats tombent.
En Tunisie, au Niger, au Congo, en Centrafrique, (Solomon se présente maintenant comme le consul de Bangui en Israël) les signatures s’accumulent au bas des promesses d’achat.

Et voilà, comme le barde dans Astérix, qu’apparait Balkany dans l’histoire.
C’est dire si tout cela est du solide. Eh non.

Il parait qu’en montant leurs trustes et holdings, Solomon et sa bande ne se sont livrés qu’à une pratique dite de la « bouilloire ».
On doit même à cette « dream team » le plus beau coup réalisé en la matière.

En juillet 2007 alors que les indices boursiers sont dans les chaussettes, une société américaine inconnue, ATI Petroleum, écoule 83000 titres au prix de 18 centimes.
C’est la très bonne affaire du moment. Vous n’êtes pas au courant ?

Le spécialiste de l’exploration du pétrole au Vietnam devient un dragon et s’apprête à faire exploser le marché du pétrole.
Le temps d’un aller et retour Deauville, la durée d’un week-end, et voilà que l’action a bondi et frôle les 4 euros.

 « Deux sites de gaz acquis en Tunisie » et hop, le cours grimpe de 1 700 %.
Si ça ce n’est pas du génie, Solomon est honnête homme !

Bien sûr les vétilleux, il y en a toujours, font observer qu’au pays de Bourguiba il n’y a ni gaz ni pétrole au moindre étage.
Pas grave.
L’important se joue en bourse. Lieu étrange où des gens fortunés, souvent instruits et méfiants sont prêts à jeter leur argent à la mer dans l’espoir d’un peu plus. Ou beaucoup.

Et paf ! Comme souvent avec Solomon, malchanceux au Monopoly, le passage par la case prison est un impératif.
L’équipe est arrêtée à Grasse au cours d’un repas de loups. Grillé, le franco-israélo- Centrafricain-Tunisien est à nouveau comme une balle de golf : au trou.

Conter les aventures de Solomon, dit « Le Roi » occuperait les pages d’un annuaire parisien, on y trouve des carambouilles sur le carbone, d’autres sur la téléphonie.
Chez lui m’imagination est au pouvoir.

Nous allons donc sauter quelques étapes pour plonger sur l’un de ses coups les plus dingues : le piratage d’un pétrolier de 234 534 barils depuis le terminal de Cyrénaïque en Libye, en pleine guerre bien sûr.

Philippe, qui n’est pas sectaire avec les opinions ou les religions, se découvre un lien d’amitié avec Ibrahim el-Jadhran qui fait métier de djihadiste privé en Libye.
 Ce joli barbu contrôle, plus ou moins, un terminal pétrolier de Cyrénaïque. Solomon entreprend de présenter ce révolutionnaire à son ami Jacob Zuma, président extrêmement corrompu d’Afrique du Sud.

Puisque, la roue de la malchance étant tournante, Solomon n’est plus seulement « consul de Centrafrique en Israël, mais surtout « conseiller » de Zuma.
Un chef d’état-bis.

La petite bande trouve plaisant que le barbu de Cyrénaïque puisse, à ce qu’il affirme, jouir du pétrole local. Ainsi, accroché au pipe d’un terminal de Libye, se trouve le « Morning Glory », plein de ses 250 000 barils de « sweet crude », le caviar en matière de pétrole.
Pas de problème, les djihadistes vont mettre en marche ce bateau et la bande à Solomon récupérer le trésor pour le livrer à Haïfa.
Quitte à reverser une obole au « pouvoir » Libyen et autres corrompus…

Le pétrolier fantôme prend donc le large pour se dirige vers Chypre.
Venus de Tel Aviv en jet privé, Solomon et ses boys se posent à Larnaka.

Puis, en compagnie de deux membres du Mossad, il embarque sur un navire.
Ce dernier doit les conduire à la rencontre du « Morning Glory ».
Mauvaise rencontre ?
Le bateau du « Roi Solomon » doit faire demi-tour. A Larnaka les policiers chypriotes se montrent soudain curieux, fortement aidés dans leur investigation par des agents de la CIA et des Forces Spéciales.

Etrangement chanceux, pour Solomon et son équipage, la sanction judiciaire s’arrête ici.
Prudent comme des Benalla tous les trois sont sagement dotés de passeports diplomatiques.
Relâchés, les israéliens peuvent regagner leur jet et Tel Aviv, alors qu’en pleine mer les soldats américains lancent l’assaut contre le « Morning Glory ». Le hold-up du siècle a échoué.

Jacques-Marie Bourget
31 décembre 2018

Jacques-Marie Bourget, né le 5 juillet 1943 à Saint-Pierre-Montlimart, en Maine-et-Loire, est un écrivain et journaliste français. Sur Internet, il publie sur les sites du Grand Soir, Oumma.com, Afrique Asie, Proche et Moyen Orient.ch et Mediapart, où il tient un blog. Wikipédia
Date et lieu de naissance : 5 juillet 1943 (Âge: 75 ans), Saint-Pierre-Montlimart, Montrevault-sur-Èvre
Livres







Ouvrez le ban : congrès de criminels sous l’Arc de triomphe.




https://revolutiontunisie.wordpress.com/2010/02/24/les-dirigeants-tunisiens-cedent-l%E2%80%99exploration-et-l%E2%80%99exploitation-de-la-richesse-du-sous-sol-a-un-escroc-isr-aelien/




PROCHE-ORIENT

Jean-René Belliard analyse le Proche-Orient
Les forces irakiennes arrêtent le Mufti IS responsable de tortures et du viol de Yezidis Le ministère irakien de la Défense a annoncé lundi 31 décembre 2018 l’arrestation d’un « mufti », responsable de la torture et du viol des femmes Yezidi (Ezidi) pendant l’occupation de la ville de Sinjar (Shingal) par l’Etat islamique (IS) en 2014….

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Une quinzaine de terroristes islamistes ont été neutralisés lors d’une opération militaire conjointe menée par l’armée nigérienne et la force française Barkhane, déployée dans le Sahel, a annoncé le ministère nigérien de la Défense dans un communiqué relayé samedi soir par la télévision d’Etat. L’opération a été menée entre jeudi et vendredi, dans la localité…

Abuja - Capitale du Nigeria

L’année 2018 est la moins meurtrière en Syrie depuis le début du conflit en mars 2011, a annoncé lundi l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), rapportant la mort de près de 20.000
personnes au cours des douze mois écoulés. « En 2018, nous avons enregistré le bilan annuel de morts le plus faible »

Damas - Capitale de la Syrie



dimanche 30 décembre 2018

Alexandre Benalla.

Par Wikipédia -

Alexandre Benalla, né le 8 septembre 1991 à Évreux, est un responsable de sécurité publique et privée, chargé de mission et coordinateur de différents services lors des déplacements officiels et privés du président de la République, Emmanuel Macron de 2017 à 2018, et dont la notoriété s'établit lors de l'affaire qui porte son nom.


François Hollande et ses gardes du corps

En 2012, il fait partie de l'équipe de sécurité de la campagne de François Hollande.
Après le départ d'Emmanuel Macron du gouvernement Valls II, Alexandre Benalla se rapproche de l'ex-ministre et est engagé comme responsable sécurité d'En marche durant la campagne présidentielle en 2017.

Après l'élection d'Emmanuel Macron, il est engagé en qualité de chargé de mission dans le cabinet présidentiel.

Alexandre Benalla, collaborateur à l'Elysée, avait été filmé le 1er mai dernier alors qu'il frappait un manifestant.

En juillet 2018, il est accusé d'avoir violenté un couple de personnes et usurpé la fonction de policier lors d'une des manifestations du 1er mai 2018 à Paris, donnant lieu à l'affaire Benalla.

Enfance et formation

Alexandre Benalla naît Maroine Benalla le 8 septembre 1991 à Évreux.

Son père est professeur de chimie et sa mère professeur de mathématiques.

Il passe son enfance avec sa mère dans la ZUP de la Madeleine, quartier périphérique dit « sensible ».

Sa famille est originaire du Maroc.
Alors que ses parents sont séparés, son père, qu'il décrit comme violent, tente de l'emmener au Maroc à trois reprises.
Sa mère le cache et change en 1995 son prénom, Maroine, pour Alexandre.

Il développe très jeune un goût pour la sécurité. Il sollicite et obtient en 2006, à l'âge de 14 ans, lorsqu'il est en troisième, un stage d'observation de trois jours auprès du Service de protection des hautes personnalités.

Il effectue ses études secondaires au lycée Augustin-Fresnel à Bernay (Eure), où il est interne.
Il joue au rugby dans l’équipe UNSS de Fresnel.

En 2009, il entre en licence de droit à l'université de Rouen-Normandie et valide celle-ci en 2013.
Il s'inscrit ensuite dans un master en administration, spécialité « sécurité publique », à la faculté de droit de Clermont-Ferrand, mais ne valide que la première année.

Alexandre Benalla (à droite) lorsqu'il accompagnait Martine Aubry en 2011.

En 2010, il effectue une formation de gendarme réserviste opérationnel (R01) à Melun, sous l’autorité du commandant de peloton Sébastien Lecornu, devenu par la suite secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire dans le gouvernement Édouard Philippe.

Parcours professionnel

Formé à la sécurité politique par Éric Plumer, responsable national du service d'ordre du Parti socialiste, il est, à partir de 2010, membre du Mouvement des jeunes socialistes, puis il travaille à partir de 2011 pour le service d'ordre du parti.

Alexandre Benalla est chargé de la protection de Martine Aubry pendant la primaire socialiste de 2011.
Alexandre Benalla fait partie l'année suivante de l'équipe de sécurité de la campagne de François Hollande, entre mars et juin 2012

En 2012, Alexandre Benalla est aussi chauffeur d'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, pendant une courte période.
Sa rupture de contrat fait l'objet de versions contradictoires.

Selon le ministre, dans une déclaration qu'il réaffirme le 3 septembre, elle s'effectue au bout d'une semaine car Alexandre Benalla lors d'un accident qu'il provoque aurait voulu prendre la fuite.
Cependant l'entourage d'Alexandre Benalla conteste l'affirmation d'Arnaud Montebourg, et le magazine people Closer donne une autre explication au licenciement, évoquant un conflit suite à un incident où le ministre aurait emprunté le boulevard périphérique à vélo.

Alexandre Benalla, lors de son audition devant la commission sénatoriale en septembre 2018, déclare avoir travaillé 3 mois au cabinet d'Arnaud Montebourg, et en être parti pour d'autres raisons que celles qui ont pu être données.

En mars 2015, Alexandre Benalla - alors étudiant - participe à une formation de l'Institut national des hautes études de la Sécurité et de la Justice (INHESJ) lors d'une session régionale « jeunes » Île-de-France.

À partir de juillet 2016, il travaille bénévolement pendant quatre mois comme « conseiller chargé des jeunes et de la banlieue » et comme chef de cabinet auprès de Jean-Marc Mormeck, le délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer.

Militaire réserviste

Gendarme adjoint volontaire, il appartient à la réserve opérationnelle jusqu'en 2017, année où il est radié à sa demande, ses dernières missions datant de 2015.

En 2017, il est intégré dans la réserve citoyenne avec le grade de lieutenant-colonel, comme spécialiste expert afin d'apporter un éclairage sur la fonction protection.
C'est sur proposition du directeur général de la Gendarmerie nationale, Richard Lizurey, qu'il est nommé en 2017 lieutenant-colonel de la réserve citoyenne.

Campagne d'Emmanuel Macron

Mai 2017 - Getty

 Emmanuel Macron quitte Bercy le 30 août 2016.
Avant l'annonce de sa candidature à l'élection présidentielle de 2017, le 16 novembre 2016, il ne dispose pas de protection rapprochée officielle.

Alexandre Benalla se rapproche d'Emmanuel Macron à ce moment, et intervient bénévolement pour En marche.

Le 5 décembre 2016, Alexandre Benalla est engagé comme responsable sécurité d'En marche.
Pendant cette campagne, il s'entoure d'un groupe, surnommé la « bande d'Alexandre » et comprenant Christian Guédon, Pierre-Yves Baratier et Vincent Crase.

Chargé de mission à l'Élysée

Après la victoire de ce dernier, il intègre l'Élysée en qualité de chargé de mission dans le cabinet présidentiel dirigé par le préfet Patrick Strzoda, devient l'un des dix adjoints du chef de cabinet François-Xavier Lauch, où il joue un rôle de coordination entre les différents services chargés de la sécurité du président.

Alexandre Benalla obtient un permis de port d'armes de la préfecture de police le 13 octobre 2017 en poste à l'Élysée, suite à une demande du directeur de cabinet Patrick Strzoda.

Il participe à des groupes de travail sur un projet de réorganisation de la sécurité du président de la République.
Le projet porte sur le rapprochement du GSPR, chargé de la sécurité à l'extérieur du palais de l'Élysée, et le commandement, chargé de l'intérieur.

Selon plusieurs sources, Alexandre Benalla vit dans l'intimité du président de la République Emmanuel Macron et de sa femme Brigitte : il les accompagne dans leurs déplacements et activités privés, au ski, au tennis, ou pendant les vacances.
D'après Le Monde, Alexandre Benalla faisait partie du « premier cercle » d'Emmanuel Macron, qui s'était entouré d'un petit groupe de « fidèles ».

Alexandre Benalla est initié franc-maçon au sein de la Grande Loge nationale française en janvier 2017.
Ayant peu fréquenté sa loge (« Les Chevaliers de l'Espérance »), il en est suspendu à titre conservatoire le 24 juillet 2018 au moment où éclate l'affaire qui porte son nom.

Activités internationales

En 2018, il est révélé plusieurs rencontres d'Alexandre Benalla avec l'homme d’affaires franco-algérien Alexandre Djouhri* à Londres, ville où il a été interpellé en janvier 2018 dans l'attente de son extradition vers la France, dans le cadre de l'affaire Sarkozy-Kadhafi.

*Alexandre Djouhri, né Ahmed Djouhri le 18 février 1959 à Saint-Denis en Seine-Saint-Denis, est un homme d'affaires français.

Date et lieu de naissance : 18 février 1959, Saint-Denis
Profession : homme d'affaires


Par ailleurs, trois semaines avant la visite d'Emmanuel Macron au Tchad fin décembre 2018, Alexandre Benalla rencontre le frère du président tchadien, Oumar Déby, alors que la France négociait des ventes d'armes avec ce pays, ce qui amène le président de la République à démentir tout statut de représentant de l’État à Alexandre Benalla.

Cependant, celui-ci voyageait, selon des informations récoltées par Mediapart, avec un passeport diplomatique émis le 24 mai 2018 par le gouvernement français.
Le ministère des Affaires étrangères affirme avoir demandé à Alexandre Benalla de rendre ce passeport dès le mois de juillet 2018.

Depuis son départ de l’Élysée, Alexandre Benalla travaille avec l'homme d'affaires franco-israélien Philippe Hababou Solomon, qui a été conseiller spécial de l'ancien président sud-africain Jacob Zuma et qui exerce dans la diplomatie privée en Afrique pour le compte de gouvernements.

Benalla s'est notamment rendu au Cameroun où il a rencontré le chef d'état-major et le directeur du cabinet de Paul Biya.

L'affaire Benalla

Alexandre Benalla est accusé d'avoir, lors d'une des manifestations du 1er mai 2018 à Paris, usurpé la fonction de policier, et violenté un couple de personnes, après que celles-ci aient jeté des objets contondants sur les agents d'une compagnie de CRS.
Il est mis à pied pendant quinze jours en mai, avec rétrogradation et sans que des poursuites judiciaires soient déclenchées.

Il lui est également reproché, par des vidéos dévoilées au mois de juillet, d'avoir participé le même jour à une autre interpellation au Jardin des plantes.

Le 19 juillet 2018, au lendemain des révélations du Monde, le parquet ouvre une enquête préliminaire pour « violences par personne chargée d'une mission de service public », « usurpation de fonctions » et « usurpation de signes réservés à l'autorité publique ».

Alexandre Benalla est peu après placé en garde à vue et mis en examen, notamment pour « violences en réunion », « immixtion dans l’exercice d’une fonction publique en accomplissant des actes réservés à l’autorité publique » et « recel de détournement d’images issues d’un système de vidéo protection ». Une procédure de licenciement est également engagée par l’Élysée contre lui.

Deux commissions d'enquêtes parlementaires sont créées, une pour l'Assemblée nationale, et l'autre pour le Sénat, en principe indépendantes des affaires judiciaires ouvertes.

Alexandre Benalla est entendu sous serment par la Commission des Lois du Sénat, le 19 septembre 2018.

Le doute des partis d'opposition et de certains médias sur la réalité des sanctions et la communication controversée de l’exécutif amplifient la polémique, qui atteint un niveau international.

Les partis d'opposition, rejoints par une partie des médias, reprochent au cabinet présidentiel de ne pas avoir signalé les faits au procureur de la République de Paris, s'étonnent de ce qu'ils considèrent comme des privilèges accordés sans justification apparente à Alexandre Benalla (son port d'arme, un logement attribué, un badge d'accès à l'Assemblée nationale, une voiture de service) et craignent l'apparition d'une police parallèle hors contrôle dédiée à la protection du chef de l'État.

Cette affaire met en lumière des dysfonctionnements au niveau de l'Élysée, ce que reconnaît Emmanuel Macron lors d'une réunion organisée le 22 juillet au palais de l'Élysée



Portraits du Fayoum

Par Karel Vereycken et Philippe Messer - 29/12/2018.

A la fin des années 1880, des pilleurs de tombes mettent à jour de remarquables portraits dans le Fayoum, une région d’Egypte située à l’ouest du Nil.
Cliquez sur l'image pour voir le diaporama :
Portrait de jeune femme habillée d'un vêtement pourpre. Fin du iiie siècle.

Dès 1887, l’antiquaire viennois Theodor Ritter von Graf acquiert un grand nombre de ces portraits et les fait connaître à travers le monde grâce à des expositions qu’il organise à Berlin, Munich, Paris, Bruxelles, Londres et New York.

Très rapidement, la polémique enfle : certains se disputent pour dater ces peintures, d’autres vont même jusqu’à crier à la fraude.
C’est l’archéologue britannique Flinders Petrie, auteur d’importantes recherches dans la nécropole d’Hawara, qui déterminera qu’ils remontent à l’époque de l’occupation romaine de l’Egypte, c’est-à-dire aux premiers siècles de notre ère.
A ce jour, on a découvert environ un millier de « portraits du Fayoum », appelés ainsi car c’est la région qui en compte le plus même même si d’autres ont été trouvés à Saqqarah, Memphis, Antinooupolis, Akhmim et Thèbes. 

Le climat sec des lieux où elles ont été placées (en bordure de cette luxuriante dépression du Fayoum) explique leur bonne conservation. 

Mais les sables chauds égyptiens ont également protégé des milliers de papyrus très précieux. Ces documents en grec, démotique, latin, hébreu, etc., nous indiquent que la population de l’époque avait un haut niveau d’alphabétisation. 
Portrait d'homme avec une couronne d'or (British Museum).

Plus encore, ils nous révèlent la rencontre exceptionnelle entre la tradition de Platon, d’Homère et des auteurs dramatiques grecs, grâce à l’importante population grecque établie en Egypte depuis Alexandre le Grand, (voir l’annexe : Alexandre le Grand en Egypte) la pensée juive de l’Ancien Testament et des écrits contemporains de Philon d’Alexandrie, le christianisme naissant et, enfin, la culture égyptienne classique. 

Ce n’est qu’en ayant à l’esprit cette richesse culturelle que l’on peut pénétrer les secrets des portraits du Fayoum.

L’Egypte antique


La première chose qui nous frappe lorsque l’on regarde ces portraits, c’est leur familiarité : le réalisme des traits conjugué avec la profondeur de l’expression effacent les nombreuses années qui nous séparent. 
A l’opposé des automatismes que dictent une peinture de cour ou un esthétisme maniériste, les portraits du Fayoum soulignent le caractère unique de chaque être humain. 
Portrait d'homme, dit « il bello »Musée Pouchkine de Moscou, Ier ou IIe s. ap. J.-C.
Il n’y aucune volonté de la part de l’artiste d’idéaliser les formes, d’aplanir les défauts physiques comme on peut le voir avec certaines statues grecques ou romaines. Il serait en effet vain de chercher la beauté de cette manière, dans un corps parfait mais sans âme ni vie. Ce que l’artiste veut faire transparaître, c’est la beauté intérieure de l’individu, celle qui ne peut jamais être altérée par des imperfections corporelles. 



Portrait de femme peint à la cire d'encaustique sur bois de sycomore vers 120-150 ap. J.-C., Liebieghaus (Francfort).
Toutefois, le souci du peintre n’est pas non plus de réaliser une réplique parfaite, hyperréaliste. Si tel avait été le cas, il se serait contenté de confectionner un masque moulé qui, malgré sa grande fidélité aux traits du visage, reste figé, « mort » et, paradoxalement, peu ressemblant.


C’est au contraire cet intérêt pour le particulier des individus qui les rend universels. Dans ce sens, ces portraits appartiennent parfaitement à la « peinture classique » telle qu’on la retrouvera, entre autres, chez Brueghel ou Rembrandt. 
Le terme « classique » ne fait ici référence ni à un code esthétique formel ni à une période historique particulière. 
L’art classique est en fait la science qui, à travers une expérience sensuelle (principalement la vue et l’ouïe), permet d’éveiller des idées, des sentiments, des principes qui sont à la fois universels et immatériels. 
Alors que le folklore privilégie l’appartenance à une communauté ou à une ethnie, l’art classique exprime ce qui est commun à tous les hommes mais spécifique à l’humanité, c’est-à-dire sa créativité.
Ainsi, nous devons considérer toutes les avancées techniques de ces peintures non pas comme une fin en soi (une prouesse) mais comme la volonté du peintre de refléter plus fidèlement la beauté du vivant et le caractère divin de l’homme. 

Portrait de femme du iie siècle ap. J.-C. (Louvre)

La peinture ne se réduit donc pas à décrire l’objet que l’on voit mais l’idée qu’il représente. Et puis, ne désignait-on pas souvent ces peintres sous le terme de zographoï, c’est-à-dire littéralement « peintres de la vie » ?

Cependant, ce qui renforce davantage ce sentiment de familiarité, c’est le regard qu’ils posent sur nous. 
Nous ne sommes pas en train d’observer, de manière distante, une scène appartenant à une autre époque mais nous échangeons un regard avec un autre être humain. 

On peut véritablement dire que, conformément à son rôle, l’artiste a immortalisé celui qu’il a peint.

Et c’est de cela dont il s’agit ici. Nous n’avons pas affaire avec des individus représentés pour la société des hommes, comme on les trouve dans certaines fresques de Pompéi, mais avec des âmes qui portent leur regard à partir du monde des morts (de l’Hadès) sur le monde des vivants. 
Portrait de jeune homme bouclé (Staatliche Antikensammlungen), Inv.-Nr 15013 (v. 300 ap. J.-C.)
En effet, les portraits du Fayoum étaient destinés à être fixés sur les sarcophages des défunts. Ils étaient peints soit directement sur les linceuls entourant le sarcophage ou sur de minces tablettes de bois insérées ensuite grâce à des bandelettes de lin.

Certes, cette tradition n’était pas nouvelle. Nous en avons un témoignage intéressant avec le commentaire de Pline l’Ancien (23-79 après J.-C.), même si celui-ci, ignorant ce qui se faisait en Egypte à son époque, était convaincu que cet art avait disparu :
« En tout cas la peinture de portraits, qui permettait de transmettre à travers les âges des représentations parfaitement ressemblantes, est complètement tombée en désuétude.(...) 

Oui, c’est bien vrai : la mollesse a causé la perte des arts et, puisqu’on ne peut faire le portrait des âmes, on néglige aussi le portrait physique. Il en allait autrement chez nos ancêtres : dans les atriums, on exposait un genre d’effigies destinées à être contemplées ; non pas des statues dues à des artistes étrangers ni des bronzes ou des marbres, mais des masques moulés en cire, qui étaient rangés chacun dans une niche : on avait ainsi des portraits pour faire cortège aux convois de famille et, quand il mourait quelqu’un, toujours était présente la foule entière de ses parents disparus ; et les branches de l’arbre généalogique couraient en tous sens, avec leurs ramifications linéaires, jusqu’à ces portraits, qui étaient peints. » (Vers 6, Histoire naturelle, Livre XXXV - La peinture).

Petrie a découvert des cadres et même certaines peintures encadrées destinées à être accrochées à un mur. 
On peut d’ailleurs constater que la plupart des portraits ont été coupés afin de pouvoir être fixés correctement au sarcophage. 
Cela indiquerait que la plupart des portraits ont été réalisés d’après nature, excepté quand il s’agissait de la mort d’un enfant. 

Femme en chiton orange (National Museum of Scotland)

Les portraits du Fayoum représentent en général des hommes ou des femmes âgés entre 25 et 30 ans, au zénith de leur vie. 
D’autre part, les recherches ont révélé que certains sarcophages décorés de portraits d’adultes contiennent des momies de vieillards, confirmant que certains portraits avaient été réalisés bien avant le décès de la personne.
Selon Petrie, les sarcophages n’étaient pas enterrés tout de suite mais gardés dressés contre un mur dans une pièce de la maison familiale, conformément à la tradition égyptienne rapportée par Diodore de Sicile au Ier siècle avant J-C : 
« (...) beaucoup d’Egyptiens gardent le corps de leurs ancêtres dans des chambres magnifiques et ont ainsi sous les yeux ceux qui sont morts bien des générations avant leur naissance, si bien qu’[ils] (...) en éprouvent une satisfaction singulière, comme si ces morts avaient vécus avec eux. »

Portrait d'homme barbu, IIIe s. ap. J.-C., musée des beaux-arts de dijon

Les sarcophages, recouverts de représentations symboliques égyptiennes qui dénotent avec le réalisme des portraits, comportent quelques fois des inscriptions, souvent en grec, ou des étiquettes sur lesquelles on peut lire le nom du défunt et d’autres commentaires comme, par exemple, « Hermione l’institutrice » ou encore « Sabinus, peintre, âgé de 26 ans. 

Bon courage ! » Petrie a aussi découvert sous la tête de la momie d’une jeune femme le deuxième livre de l’Iliade sous forme d’un rouleau de papyrus, montrant leur attachement à cette grande culture classique.


Portrait de jeune homme vers 130-150 ap. J.-C., Musée Pouchkine de Moscou.
Ce qui est étonnant, c’est que cette pratique ne semble pas liée à une catégorie particulière de la population. En effet, leurs origines ethniques, sociales et même religieuses sont très diverses : on trouve des prêtres du culte de Sérapis, des juifs et des chrétiens (malgré les protestations, les chrétiens d’Egypte embaumaient leurs défunts jusqu’au IVème siècle après J.-C.) ; des hauts fonctionnaires romains et des esclaves affranchis, des athlètes et des héros militaires ; des Ethiopiens et des Somaliens, etc. 
Toutefois, il serait faux de croire à une sorte de « conversion » à la religion égyptienne de la part de ces personnes. 
En fait, on peut véritablement parler d’un oecuménisme autour de certaines idées qui transcendent les rites funéraires égyptiens.
Il apparaît clairement que ces peintures réunissent tous ces hommes et femmes d’origines si différentes autour d’une idée fondamentale : l’âme est immortelle. La rencontre avec le peintre, lui-même mortel, se concentre alors autour d’une réflexion sur l’éternel, et le modèle réfléchit sur le caractère éphémère de son existence.

Tous ces portraits ont cette caractéristique d’avoir les yeux grands ouverts exprimant un étonnement tranquille, une angoisse maîtrisée devant une mort sereine. 
L’acceptation du caractère incontournable de la mort se transcende ici en amour pour la vie, en affirmation tranquille que chaque être humain est porteur d’une part singulière d’éternité.

Le fait est que nous sommes sur terre à peine pour quelques décennies et ce temps ne doit pas être gaspillé si l’on veut laisser quelque chose après sa mort. 

Ce que Diodore de Sicile décrit ainsi : 

« C’est ce que les gens du pays tiennent pour tout à fait négligeable le temps passé à vivre et qu’ils font le plus grand cas du temps qui, par la vertu, restera dans la mémoire après la mort ; ils nomment les habitations des vivants des auberges, puisque nous n’y passons qu’un bref moment, et donnent le nom d’habitations éternelles aux tombeaux, puisque les morts mènent en Hadès une existence illimitée. »

Mais quel était le contenu de ces rituels funéraires égyptiens ? 

D’abord, il faut bien comprendre que les croyances égyptiennes ont beaucoup évolué, et que derrière les noms d’Osiris et d’Isis se trouvent des cultes dont la nature est totalement différente selon les époques et les traditions. 
De plus, il est fort probable que l’influence des premiers chrétiens et des juifs ont privilégié les aspects des croyances égyptiennes les plus compatibles avec leur religion. 

Enfin, il faut noter que, comme le souligne justement Jean Vercoutter, la religion égyptienne, polythéiste de forme, tend en fait à un monothéisme de fond (Aménophis IV-Akhénaton a même tenté de le formaliser). A tel point que les premiers chrétiens en Egypte n’ont eu aucun problème à traduire le terme « Dieu » par le terme égyptien « neter » désignant la divinité non représentable.

Pour les Egyptiens, face à la mort, il convient d’agir conformément à Maât, symbole de la vérité et de la justice mais surtout de l’ordre universel tel qu’il a été établi au moment de la création du monde. 

Et le souci de tout homme doit être de « placer Maât en son coeur ». 

Le défunt est amené par Anubis, divinité bienveillante à tête de chien et muni d’une clef, devant le Tribunal divin. 
C’est là que l’on va peser son coeur, siège de la conscience. Sur l’un des plateaux de la balance, on trouve une image de la déesse Maât et sur l’autre, le coeur. 

Si les deux plateaux sont au même niveau, le défunt est déclaré « juste » et, accédant lui-même à l’état d’« Osiris », Horus l’accompagnera auprès d’Osiris. 

Rappelons que les Egyptiens pratiquent la momification pour préserver l’unité de l’individu, corps et âme confondus. 

C’est cette unité perdue qui a fait tomber le roi Osiris (lorsqu’il a été assassiné et découpé en plusieurs morceaux) et c’est cette unité retrouvée (quand Isis a recomposé son corps) qui a permis sa résurrection. 

Comme l’exprimera un théologien chrétien du XIIème siècle : « (...) l’unité est la forme de l’être de toute chose, on répond en vérité que tout ce qui est, est parce qu’il est un. (...) 
En fait, l’unité est entretien et forme de l’être alors que la division est la cause de l’anéantissement. »

Il est vrai, cependant, que nous n’avons aucun écrit de cette époque concernant ces portraits et leur signification exacte, mais les indications qui précèdent nous éclairent sur l’esprit général de leur démarche.
Beaucoup plus tard, cet esprit sera porté à un niveau supérieur, débarrassé de ses formes païennes. 
Le regard en peinture deviendra, de manière explicite, le miroir de l’âme humaine. 

Au XVème siècle, le cardinal Nicolas de Cues ira encore plus loin dans son ouvrage Le tableau ou la vision de Dieu, dans lequel il utilise comme base de réflexion un autoportrait de Rogier van der Weyden ayant comme particularité de fixer du regard l’observateur peu importe où celui-ci se trouve. 
Nicolas de Cues va comparer ce regard à la vision de Dieu et rapproche le terme « Dieu » (theos) à celui de « voir » (theôrein). 

Le Cusain pose d’abord un paradoxe : « Cependant, ton regard me porte à considérer pourquoi l’image de ta face est peinte de manière sensible : c’est qu’on ne peut peindre une face sans couleur et que la couleur n’existe pas sans quantité. 
Mais ce n’est pas avec les yeux de chair qui regardent ce tableau, c’est avec les yeux de la pensée et de l’intelligence que je vois la vérité invisible de ta face qui se signifie ici dans une ombre réduite. » 

Ensuite, il insiste sur le fait que ce n’est pas seulement le regard du tableau qui est important mais aussi celui de l’observateur : « (...) ta face portera ce que le regard de qui te regarde y apporte », en soulignant que « là où est l’oeil, là est l’amour ». 
Ainsi, le regard porté sur l’autre devient acte d’amour :

« (...) Je vois maintenant en un miroir, en un tableau, en une énigme, la vie éternelle qui n’est autre que la vision bienheureuse, et c’est en cette vision que tu ne cesses jamais de me voir avec le plus grand amour jusqu’au plus profond de mon âme. 
Et pour toi, voir n’est autre que donner vie, m’inspirer toujours l’amour le plus doux, (...) me donner la fontaine de vie, par ce don augmenter et faire durer mon être, me communiquer ton immortalité(...). » [Souligné par nous]

Maintenant, regardez à nouveau les portraits du Fayoum. 
Ne sommes-nous pas en présence d’une « vie éternelle qui n’est autre que la vision bienheureuse » ?

Ces peintures ne nous remémorent pas seulement le souvenir d’individus que l’on n’a jamais connus, elles immortalisent également le peintre anonyme qui, grâce à son art, continue aujourd’hui à nous émouvoir.
Contrairement à ce qui est souvent avancé, nous ne sommes pas en présence de « peintures romaines ». 
Euphrosyne Doxiadis, se basant sur les recherches passionnées du peintre moderne grec Yannis Tsarouchis, affirme qu’« elles étaient une contribution des Grecs au combat des Egyptiens contre la mort ». 
On peut faire remonter cette tradition picturale au moins jusqu’à l’époque du portraitiste exclusif d’Alexandre, le peintre réaliste Apelle (360-300 av. J.-C.).
Deux indices révèlent une influence éventuelle de cette tradition sur les portraits de Fayoum. Pline l’Ancien nous apporte le premier indice lorsqu’il décrit les peintures d’Apelle :
« Le point sur lequel cet art manifestait sa supériorité était la grâce, bien qu’il y eût à la même époque de très grands peintres ; mais, tout en admirant leurs oeuvres et en les comblant toutes d’éloges, il [Apelle] disait qu’il leur manquait ce fameux charme qui lui était propre et que les Grecs appellent Charis ; qu’ils avaient atteint à toutes les autres perfections mais que, sur ce seul point, il n’avait pas d’égal. 

Il revendiqua aussi un autre titre de gloire : alors qu’il admirait une oeuvre de Protogène, d’un travail immense et d’un fini méticuleux à l’excès, il dit en effet que sur tous les autres points ils étaient égaux ou même que Protogène était supérieur, mais qu’il avait, lui, ce seul avantage de savoir ôter la main d’un tableau (précepte digne d’être noté), selon lequel un trop grand souci de la précision est souvent nuisible. » (vers 80, Livre XXXV)

N’est-ce pas là précisément l’un des éléments stylistiques caractéristiques des portraits du Fayoum ?

Aucun tableau ni traité d’Apelle, ou de son maître Pamphile (qui avait eu comme maître Eupompe, natif de Sicyone), n’a survécu jusqu’à nos jours. Selon le témoignage de Pline, Eupompe aurait été l’initiateur d’une révolution picturale, ajoutant aux genres attique et ionien qui composent le genre hellénique celui de l’école de Sicyone. On peut se faire une petite idée de cet art grâce à certaines mosaïques, comme celle de Pompéi représentant Alexandre à la bataille d’Issos (IIème siècle av. J.-C.), qui serait la copie d’une oeuvre d’un peintre de l’école de Sycione. 
On retrouve cette même tradition à Alexandrie dans de monumentales mosaïques, des portraits de femmes réalisés aussi au IIème siècle av. J.-C. et reflétant l’attachement au réalisme dans la représentation. 
Rajoutons à cela le fait important que les Grecs en Egypte ont introduit les pauses de trois quarts et de face dans un pays où, il semblerait, toutes les figures avaient été jusque-là peintes de profil.
Le deuxième indice, c’est la tétrachromie, c’est-à-dire l’utilisation de quatre couleurs. Cela peut sembler incroyable mais jusqu’à l’invention dans les années 70 des peintures acryliques (polymères de plastique), les ingrédients de base de la peinture n’ont quasiment pas changé de l’école sycionienne qui forma Apelle jusqu’à Rembrandt et Goya, en passant par les peintres du Fayoum ! 
Ses ingrédients qui composent les médiums sont, dans des proportions diverses, l’albumine du jaune et le blanc d’oeuf (le sang pour les peintres de la préhistoire), la colle (produit, par exemple, à partir des peaux), les résines aqueuses, les essences, les huiles et la cire d’abeille.
La fameuse palette à quatre couleurs d’Apelle, la tétrachromie se retrouve entièrement dans les portraits de Fayoum : le melinum, un blanc constitué d’une craie argileuse venant de l’île de Mélos (éventuellement remplacé par le blanc de plomb) ; le sil attique ou ochra : un jaune tiré du limon recueilli dans les mines d’argent ; la sinopis du Pont : une terre d’ocre rouge venant de Sinopis ; l’astramentum : un noir fabriqué de diverses manières, en toute probabilité du noir de vigne permettant des reflets bleus. 

D’autres pigmentsapparaissent seulement pour remplacer ces derniers selon des circonstances de disponibilité ou pour le détail d’un bijou (terre verte naturelle ou malachite) ou d’un vêtement (rose garance naturel, rose cyclamen ou la coûteuse pourpre extraite des coquillages).

Pour les portraits du Fayoum, soit on appliquait une peinture à la cire (encaustique) sur des supports en bois soit on travaillait à la détrempe sur des toilesdelin (déjà !).
Il s’agissait principalement de minces planchettes en figuier de sycomore, facile à trouver à cette époque en Egypte, ou en cyprès (le chêne typique des peintres du nord étant très rare en méditerranée). 

La cire d’abeille (blanchie) était chauffée et mélangée avec d’autres substances, comme des résines du type Mastic de Chios, aux pigments. On pouvait aussi la préparer pour être appliquée à froid (cire punique) après l’avoir émulsionnée ou saponifiée, permettant des mélanges astucieux avec l’oeuf ou l’huile. 

Pour travailler la matière, on utilisait trois types d’instruments : le pinceau, le cautère(un fer chaud) et le cestre (un petit poinçon).

Sur la toile de lin, on travaillait plutôt à la détrempe, après avoir posé une couche de colle mélangée à une fine couche de plâtre (équivalent du gesso). Sur le bois, où l’on appliquait d’abord une couche de colle à la détrempe, on posait les carnations parfois directement sur le brun miellé du bois nu ou sur un fond teinté kaki, le proplasmos, équivalent de l’impression ou de l’impregnatura des grands maîtres classiques européens.

Comme l’affirmait correctement le peintre grec moderne Tsarouchis, « le bon coloriste voit une harmonie de couleurs où d’autres voient des objets ». 
Ainsi, sur ce fond kaki et travaillant du foncé vers le clair, on construisait la profondeur en opposant teintes froides et chaudes pour faire avancer ou reculer l’espace, plutôt que par le clair-obscur.
On retrouve ce démarrage sur fonds sombre dans le Titus, oeuvre de l’entourage de Rembrandt au Louvre, et chez la Jeune fille au turban de Vermeer au Mauritshuis de La Haye. 

La peinture se libère de sa prison de lignes captives pour devenir une sculpture de lumière.

Le peintre et historien florentin Giorgio Vasari (1511-1574) rapporte avec stupeur dans Les Vies des excellents peintres, sculpteurs et architectes que la peinture, à partir du milieu du XIIIème siècle, n’avait pas seulement été négligée mais avait « quasiment disparu » en Occident.

Pour la faire revivre, une équipe de peintres grecs fut de tout urgence invitée par les autorités de Florence, convaincues que ceux-ci détenaient les secrets perdus de cet art. 
Un jeune homme issu de la noblesse, Cenni di Pepe (1240-1302 ?), plus connu sous le nom de Cimabue, délaissa ses études pour suivre leurs travaux. 
Une fois initié à leurs secrets d’artisans, il deviendra le maître de Giotto, figure fondatrice de la Renaissance qui, sous l’impulsion de quelques franciscains éclairés, fera renaître la peinture classique. 
Et l’on peut véritablement parler d’une re-naissance puisque cet art fut pratiquement inexistant pendant les quelque mille deux cents années qui séparent le XVème siècle des portraits du Fayoum.
En effet, le fil de cette tradition picturale a été coupé. Cette région du Nil extrêmement riche a d’abord été pillée par l’empire romain : près de 30% de sa production de grain était destiné à Rome et toute l’infrastructure liée à l’eau a été progressivement négligée. 
Ensuite, en 395, l’Egypte deviendra une partie intégrante de l’empire byzantin. 
C’est alors que la peinture entrera dans un monde à deux dimensions et cela pour des siècles. L’avènement de l’empire byzantin avec ses icônes a institué une stylisation plate et un symbolisme qui a aboutit à la superstition du « dédoublement magique » : le tableau devenu objet est supposé posséder « magiquement » les qualités divines de ce qu’il représente. 
Il prétend capturer pour toujours un segment d’éternité et ne représente qu’un moment de vide. 
De ce point de vue, les portraits du Fayoum, malgré des ressemblances techniques, sont à l’opposé de la tradition des icônes. On pourrait dire qu’en perdant cette quatrième dimension de la transcendance, la troisième dimension, celle de l’espace créé par l’unité entre perspective et couleurs, s’est dissipée avec elle.
Mais ce fil qui a été renoué au moment de la Renaissance, qu’est-il devenu aujourd’hui ?

Bibliographie
• Jean-Christophe Bailly, L’apostrophe muette, essai sur les portraits du Fayoum, Hazan,1997.
• Catherine Bridonneau, « Le Livre des Morts et les coutumes funéraires », in Le monde de la Bible, n°78, sept.-oct. 1992.
• Euphrosyne Doxiadis, Portraits du Fayoum, Gallimard 1995.
• Pline l’ancien, Histoire Naturelle, XXXV, La Peinture, Les Belles Lettres, 1997.
• Nicolas de Cues, Le Tableau ou la vision de Dieu, Editions du Cerf, 1986.
• André Bonnard, Civilisation Grecque, d’Euripide à Alexandre, Editions Complexe, 1991.
• Jean Vercoutter, « L’Egypte antique », in Encyclopedia Universalis.

http://www.agora-erasmus.be/Portraits-du-Fayoum-un-regard-de-l-au-dela_01586