lundi 17 juin 2019

Le plaisir

HÉDONISME ET EPICURISME

Extrait de Wikipédia

La différence entre l’hédonisme et l’épicurisme est le rapport au plaisir :

– Epicure affirme que l’homme doit maîtriser ses plaisirs, en ne consentant qu’aux plaisirs naturels et nécessaires (besoins vitaux)

– Les hédonistes pensent que l’homme doit maximiser ses plaisirs, quel qu’ils soient.

L'hédonisme est parfois confondu avec l'eudémonisme, les deux doctrines pouvant soit se rapprocher soit s'opposer selon les théories.

Portrait d'Épicure, fondateur de l'épicurisme. Copie romaine d'un original hellénistique.

L’hédonisme (du grec ancien : ἡδονή / hēdonḗ, « plaisir » et du suffixe -ισμός / -ismós), est une doctrine philosophique selon laquelle la recherche du plaisir et l'évitement de la souffrance constituent le but de l'existence humaine.
Elle est revendiquée de manière absolue par le cyrénaïsme.


Aristippe de Cyrène

L'hédonisme se différencie de l'eudémonisme, théorisé notamment par les Épicuriens et les Stoïciens, qui considèrent le bonheur et non le plaisir comme but de la vie humaine.

Les Épicuriens adoptent toutefois une position particulière car s'ils considèrent effectivement le bonheur comme le but de la vie humaine, ils perçoivent les plaisirs, lorsqu'ils sont naturels et nécessaires, comme un intermédiaire permettant de l'atteindre.

La doctrine épicurienne peut donc être perçue soit comme un eudémonisme, soit comme une forme d'hédonisme raisonné.

Pensée philosophique

Les plaisirs de l'existence, multiples, varient selon les individus et selon leur éducation.

Les penseurs hédonistes ont orienté leur vie en fonction de leurs dispositions propres, mais on retrouve des thèmes communs :
- l'amitié,
- la tendresse,
- la sexualité,
- les plaisirs de la table,
- la conversation,
- une vie constituée dans la recherche constante des plaisirs (cf. le Gorgias de Platon), un corps en bonne santé.

On peut aussi trouver la noblesse d'âme, le savoir et les sciences en général, la lecture, la pratique des arts et des exercices physiques, le bien social…

Dans le même temps, les douleurs et les déplaisirs à éviter sont :
- les relations conflictuelles et la proximité des personnes sans capacités contractuelles (sans paroles),
- le rabaissement et l'humiliation,
- la soumission à un ordre imposé,
- la violence,
- les privations et les frustrations justifiées par des fables, etc.

Ainsi, il n'y a pas d'hédonisme sans discipline personnelle, sans connaissance de soi, du monde et des autres.

Les fondations directes d'une philosophie hédoniste sont la curiosité et le goût pour l'existence d'une part, et d'autre part l'autonomie de pensée (et non la croyance), le savoir et l'expérience du réel (au lieu de la foi).

La pensée hédoniste a été fermement combattue par les principales religions monothéistes.

Beaucoup de philosophes hédonistes, ou ayant une conception qui s'en rapprochait, ont adopté des positions athées (Michel Onfray, « athéisme athée comme franche et claire négation de Dieu » et dénonciation des athéismes « post-religieux » qui acceptent toutes les conséquences éthiques liées à la religion) ou agnostiques ; et dans une autre dimension, une position anarchiste (Michel Onfray, revendiquant « la société socialiste libertaire actionné selon la mécanique des micro-résistances concrètes » comme la modalité politique de l'hédonisme).

Michel Onfray

Il faut noter cependant l'existence d'une ligne de pensée chrétienne  revendiquant la foi chrétienne comme étant l'hédonisme véritable, car menant au plaisir le plus profond et le plus durable, dans la contemplation de Dieu.

John Piper's church. Also see here American Eagle

Le représentant contemporain le plus notable en est John Piper, qui n'hésite pas à qualifier sa position d'hédonisme chrétien, mais la même idée se retrouve chez C. S. Lewis, Pascal, Érasme, Thomas d'Aquin et Augustin.

Selon Nietzsche la revendication de l'hédonisme chrétien n'est pas légitime.

 Selon lui, l'hédonisme chrétien est une déformation de la réalité, de ce qu'est la nature de l'hédonisme même.
La religion chrétienne tend à prendre des états philosophiques existants, ou des traditions, ou encore de la vérité et à les vider de leur contenu, de leur nature afin de les refaire sous une forme chrétienne et ainsi de les intégrer sous une image vide de sens à cette religion.

D'après Michel Onfray, l'hédonisme se résume par cette maxime de Chamfort : « Jouis et fais jouir, sans faire de mal ni à toi, ni à personne, voilà je crois, toute la morale ».
Pour l'auteur Rudy Méliczek, l'hédonisme doit être mesuré et réfléchi.
Sans une certaine sagesse, il peut être galvaudé.

En ethnologie

« Hédonistique » est un adjectif créé par des ethnologues pour désigner les sociétés dans lesquelles les interactions sont destinées à les prolonger ou à en établir, en contraste avec les sociétés agonistiques où les interactions sont orientées à les interrompre ou les diminuer.

Histoire

La doctrine est associée notamment dans l'Antiquité à Aristippe de Cyrène et au Cyrénaïsme, mais aussi à Épicure, bien que leurs définitions du plaisir soient différentes.

Épicure rappelle qu'un plaisir excessif actuel doit être évité s'il conduit à une douleur future alors que les Cyrénaïques insistaient sur le fait que le plaisir est toujours le but présent de l'action, même si cette fin est relativisée et se modifie dans le temps.

Jeremy Bentham, le fondateur de l'utilitarisme, le comprenait comme un « calcul hédoniste », qui devait systématiser l'idée de mesure des plaisirs dans le Philèbe de Platon.
Ce calcul constitue une des bases des modélisations dans la théorie de la décision.

John Stuart Mill, qui reprit la doctrine utilitariste, reprocha ensuite à Bentham de ne pas avoir donné de hiérarchisation qualitative de la nature des plaisirs. Mais une telle hiérarchisation fait sortir de l'hédonisme pour y introduire d'autres valorisations et d'autres fins (comme celle de « vie bonne pour l'homme », qui recherche une valeur du bonheur en plus des plaisirs).

Critique

Le cardinal Poupard voit dans l'Occident actuel une mentalité de consommation — marquée par l'hédonisme — qui engendrerait relativisme moral et indifférence religieuse.

Le cardinal Paul Poupard le 15 août 2015 - Claude Truong-Ngoc

Dans les médias

La série télévisée d'animation Futurama comporte un personnage récurrent du nom de « robot hédoniste », allégorie caricaturale de la philosophie éponyme.


Épicurisme

L'épicurisme, est un courant de la philosophie occidentale ayant pour objectif principal l'atteinte du bonheur par la satisfaction des seuls plaisirs de la vie.

C'est une doctrine matérialiste et atomiste qui peut être soit qualifiée d'hédonisme raisonné soit d'eudémonisme.

L'épicurisme est issu de l'école du Jardin, fondée à Athènes par Épicure en 306 av. J.-C., et est de ce fait aussi appelé « doctrine d'Épicure » ou « philosophie du Jardin », Épicure ayant établi son école dans un petit jardin acquis à Athènes.

Son héritage a été revendiqué par le matérialisme moderne (Marx notamment, mais aussi certains penseurs classiques proches des libertins comme Pierre Gassendi et les matérialistes des Lumières comme Diderot ou D'Holbach).

L'épicurisme propose de s'appuyer sur le plaisir, défini comme souverain bien, et sur le rejet de la souffrance afin d'atteindre un état de bonheur, une sérénité de l'esprit, caractérisé par l'absence de troubles, l'ataraxie.
Toutefois, à la différence de l'hédonisme tel qu'il est pratiqué par les Cyrénaïques, l'épicurisme bannit toute forme de plaisir non naturel et non nécessaire et consent à accepter certaines formes de souffrances.

Ainsi contrairement au « plaisir en mouvement » et immédiat d'Aristippe de Cyrène, la recherche d'Épicure du « plaisir en repos » (en absence de douleur) dans « la mémoire des plaisirs corporels du passé et dans l'anticipation de ceux de l'avenir » fait que « sa doctrine était en réalité beaucoup plus proche de l'ascétisme que de l'hédonisme ».

L'abolition de la crainte de la mort et des dieux complète l'éthique épicurienne. Ces quatre éléments sont traditionnellement regroupés sous l'appellation de « quadruple remède » ou tetrapharmakos8 (τετραφάρμακος).

L'épicurisme professe que pour éviter la souffrance il faut éviter les sources de plaisir qui ne sont ni naturelles ni nécessaires.

Il ne prône donc nullement la recherche effrénée du plaisir.

La caricature de l'épicurien jouisseur — qui remonte à l'Antiquité et est déjà bien présente, mais avec humour et distance, chez Horace se définissant comme un « porc du troupeau d'Épicure » —, commença par la confusion entre l'épicurisme et l'hédonisme d'Aristippe de Cyrène, plus connu sous le nom de cyrénaïsme, puis se répandit par le biais de la polémique philosophique et, plus tard, de la propagande des Pères de l'Église, qui rejetaient le matérialisme de cette philosophie.

L'épicurisme entre en concurrence avec une autre grande pensée de l'époque, le stoïcisme, fondé en 301 av. J-C.

En effet, les deux courants, matérialistes et monistes, sont l'un comme l'autre axés sur la recherche du bonheur mais proposent des moyens différents pour y parvenir.

Il entretient également une polémique constante avec le scepticisme, dans la mesure où l'épicurisme est une doctrine dogmatique, c'est-à-dire croyant à la possibilité d'utiliser des critères de vérité pour fonder des connaissances certaines.

Le critère de vérité épicurien est la sensation.

L'épicurisme antique – Le succès de la doctrine

L'épicurisme, en tant que conception matérialiste du monde, se diffuse avec succès dans tout le bassin méditerranéen d'Alexandrie à Rome et demeure vivace jusqu'aux premiers siècles du christianisme.

Le nombre des épicuriens fut très important à certaines périodes, au témoignage de Diogène Laërce, qui écrit que « les villes ne pouvaient plus contenir [ses amis] » :
« Le charme de cette doctrine égalait la douceur des sirènes. »

La doctrine semble avoir eu un grand succès en Campanie, comme en témoigne la présence d'une bibliothèque et d'un cercle épicuriens constitués autour de la figure de Lucius Calpurnius Pison.

On trouve également des traces de présence épicurienne jusque sur le site d'Oeonanda (dans l'actuelle Turquie) via l'inscription épicurienne monumentale édifiée au IIIe siècle par Diogène d'Œnoanda.
Plotina Pompeia, épouse de Trajan, semble avoir été proche de l'école.

Cicéron, pourtant adversaire d'Épicure, ne contredit pas un de ses interlocuteurs qui s'écrie avec enthousiasme :
« Quelle nombreuse élite d'amis il rassemblait dans sa maison ; quels intimes rapports d'affection mutuelle dans ce commun attachement au maître !
 Et cet exemple est encore suivi par tous les épicuriens. (De finibus I,) »

Causes de ce succès

Les publications d’Amafinius, considéré comme le premier philosophe à écrire en langue latine et de Lucrèce firent de l'épicurisme une doctrine populaire dans toutes les couches de la société.
Elles avaient la réputation d'être relativement facile à saisir, moins techniques que l'enseignement de la Nouvelle Académie ou du stoïcisme.

Dans un monde où le choc incessant des guerres et l'aggravation de la misère bouleversent les valeurs traditionnelles,

« l'épicurisme propose un idéal de bonheur individuel et une vision du monde où ni les dieux, ni même la mort ne sont à craindre, car si tout l'univers est composé d'atomes éternels et indestructibles, l'homme ne doit rien à l'initiative des Dieux. »

Caractères de l'école épicurienne

L'école épicurienne a la réputation d'être restée fidèle à la doctrine originelle d’Épicure jusqu'à son extinction.
Ce fait est attesté notamment par Numénius dans les fragments de son traité Sur l'infidélité de l'Académie à Platon, qui pointe la soumission des disciples d’Épicure à ses dogmes.

Épicure était vraisemblablement l'objet d'un culte au sein du Jardin ; selon Plutarque, de son vivant déjà on relève des marques extrêmes de dévotion de la part de certains de ses disciples, comme Métrodore et Colotès de Lampsaque (Contre Colotès ).

Suivant la recommandation du maître dans son testament, les disciples célébraient chaque année l'anniversaire de sa naissance ; tous les mois, par une réunion plus solennelle, ils rappelaient son souvenir.

Ils exposent dans leur chambre à coucher le portrait d'Épicure, ils en portent sur eux des réductions.
Pas moyen d'oublier le fondateur de l'épicurisme, s'écrie Pomponius dans Cicéron, lorsque sa figure est chez nos amis, non seulement en peinture, mais jusque sur leurs vases et leurs bagues.

Pour ses disciples, Épicure est le libérateur — il est désigné souvent comme sôtèr, sauveur.

Le poète Lucrèce le décrit dans un éloge célèbre comme « honneur de la Grèce » et père (De Rerum Natura III, v. 1-99) : il est à ses yeux l'homme et le philosophe qui a débarrassé l'humanité de la nuit noire de la superstition ; c'est le défenseur des droits de la liberté et de l'indépendance personnelle contre toute tradition religieuse.

Aussi Lucien de Samosate parle-t-il d'Épicure comme d'un « homme saint, divin, qui seul a connu la vérité et qui en la transmettant à ses disciples est devenu leur libérateur ».

Non content de révérer la personne d'Épicure, ses disciples ont un égal respect pour sa doctrine.
Selon Cicéron, qu'il ne faut peut-être pas prendre ici au pied de la lettre, leur secte sait peu ce qu'on dit ailleurs.

Les épicuriens ne lisent que ses écrits, ils les aiment exclusivement, et sans connaissance de cause, ils condamnent les autres.

Tout ce qui a plu au maître plaît aux disciples qui se feraient un crime de changer la moindre chose.
Cette hypothèse est aujourd'hui assez sérieusement atténuée par les historiens : si la doctrine elle-même a connu peu d'infléchissements notables, elle est restée en dialogue permanent avec les autres sectes philosophiques et l'isolement absolu n'est plus défendu aujourd'hui.

Il y a au Louvre un marbre qui représente sur une de ses faces Épicure, et sur l'autre son inséparable ami Métrodore.
On dirait une petite république où l'accord est complet entre tous les membres, selon les mots de Numénius cités par Eusèbe de Césarée.
C'est là un côté par lequel l'épicurisme ressemble au pythagorisme : les disciples restent profondément unis.

Épicure avait montré l'exemple ; pendant le siège d'Athènes par Démétrios, il avait nourri tous ses disciples (Plutarque, Démétrius,).
Sa dernière pensée est de recommander les enfants de son ami, Métrodore ; c'est à eux, en grande partie, qu'est consacré son testament.

L'amitié ou philia est en effet une notion cardinale de l'éthique épicurienne.

Cicéron développe cet aspect de la doctrine dans le livre I du traité De finibus. Cette pratique philosophique et propédeutique de l'amitié est encore mal connue.
Elle a beaucoup intéressé Michel Foucault qui a dans les dernières années de son enseignement émis des hypothèses sur la pratique épicurienne de la parrhèsia philosophique.

Les épicuriens sont connus pour avoir souhaité se tenir à l'écart de la vie publique, selon le prétexte popularisé par le pamphlet de Plutarque « Vis caché ! » (lathè biôsas en grec).
Ce refus de la participation politique s'explique principalement par l'identification du désir de gloire et de richesse comme un désir orienté vers des réalités bien plus toxiques que plaisantes, et par une volonté de fuir les situations de souffrance et de risque.

Cela ne signifie pas l'absence de toute préoccupation collective, comme le montre bien la prégnance de la notion d'amitié dans l'éthique épicurienne. De fait, la doctrine épicurienne propose des développements significatifs sur l'origine du droit, la notion de justice, la philanthropia, et la rhétorique comme technique politique.

Ces points sont particulièrement documentés dans les Maximes Capitales d’Épicure, les fragments de l'épicurien Hermarque transmis par Porphyre, et de nombreux traités de Philodème comme l'Economique, Le bon roi selon Homère ou les livres sur la Rhétorique.
On trouve des traces d'une polémique sur cette question de l'implication politique dans ce qui reste du De otio de Sénèque.

Influences philosophiques et postérité de l'épicurisme

La doctrine d’Épicure a eu une postérité considérable à de nombreuses époques.

Sur le plan politique et éthique, on considère souvent les épicuriens comme les premiers penseurs utilitaristes et conventionnalistes.

La justice, suivant Épicure, est fondée sur des conventions mutuelles de non-agression qui ne tiennent que par appréhension de l'utile pour ceux qui en sont capables et crainte du châtiment pour les autres.

 Les principes du droit ne sont donc pas fondés sur des normes naturelles mais sur des décisions locales guidées par une compréhension ponctuelle de ce qui favorisera collectivement la poursuite du plaisir et l'évitement de la souffrance. On a pu y voir les premiers balbutiements des théories contractualistes de penseurs comme Locke, Hobbes et Jean-Jacques Rousseau.

Pierre Gassendi, éditeur, traducteur et commentateur d’Épicure, en proposera une défense argumentée dans son Vie et mœurs d’Épicure.

Les théories corpusculaires de la physique cartésienne sont construites en opposition avec cette physique atomiste épicurienne défendue par Gassendi.

On trouve des traces de la théorie épicurienne de la connaissance chez Kant, dans l'exposé de l'Analytique et de la Dialectique transcendantale dans la Critique de la raison pure.

L'influence des atomistes antiques est considérable en France chez les penseurs des Lumières.

Diderot dans le Rêve de D'Alembert, D'Holbach dans son Système de la Nature et La Mettrie puisent une partie importante de leur inspiration dans la physique épicurienne.

Cette filiation se retrouve chez les représentants les plus contemporains du matérialisme, et tout premièrement chez Marx, auteur d'une dissertation sur Épicure et Démocrite.
Cette reprise marxiste explique l'abondance de travaux philologiques et philosophiques parfois de tout premier plan consacrés à l'épicurisme antique dans les pays de l'ex Bloc de l'Est.

En France, les poètes Francis Ponge et Raymond Queneau dans sa Petite Cosmogonie portative se réclament également de l'épicurisme dans sa transmission lucrétienne.















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