Par Catherie Alles – 17/06/2019
Lorsque vous donnez de l’argent, il est important de
vérifier qu’il va au bon endroit et qu’il est dépensé efficacement.
Après tout, les dons ne servent à rien s’il y a de la
corruption dans le système de leur gestion.
Affiche d'une campagne de prévention contre la
corruption en Mauritanie. Photo (c) C. Hug
Pas plus tard qu’hier, alors que je réfléchissais à
l’opportunité de faire un don à une organisation à but non lucratif, quelques
pensées me traversèrent l’esprit. Premièrement, cette organisation
défend-t-elle une cause que je soutiens ? Et deuxièmement, puis-je être sûre
que mon argent sera entre de bonnes mains et qu’il sera utilisé à bon escient ?
Après tout, la plus grande crainte des donateurs est que
leur argent soit perdu, volé ou gaspillé. En cas de crise, de généreux
philanthropes ainsi que des citoyens ordinaires du monde entier se mobilisent
pour aider. Malheureusement, la cupidité, la malhonnêteté et l’incompétence
sabotent parfois des efforts bien intentionnés pour aider les autres.
COMMENT LA
CORRUPTION A ALIMENTÉ L’ÉPIDÉMIE
Lorsque le virus Ebola a éclaté en Afrique de l’Ouest en
2014, le monde entier a été choqué par les dégâts dévastateurs de l’épidémie.
Dans les années qui ont suivi, plus de 10 000 personnes
ont péri à cause du virus plongeant le monde en deuil.
Selon la BBC, la Croix-Rouge a recueilli plus de 100
millions de dollars de dons pour lutter contre la maladie.
Sur ces 100
millions de dollars, 5 millions de dollars, ou 5 %, ont été volés.
Transparency International a constaté que près de la
moitié des patients Ebola en Sierra Leone et au Libéria devaient verser un
pot-de-vin pour recevoir des soins médicaux.
Les Libériens étaient si méfiants à l’égard de leur
propre gouvernement que, lorsque le virus Ebola s’est propagé au Libéria, de
nombreux citoyens pensaient que le gouvernement avait fabriqué l’épidémie et
s’en servait pour solliciter des dons qu’il pourrait ensuite voler.
Conséquence préjudiciable de cette croyance, de nombreux
Libériens ont ignoré les avertissements du ministère de la Santé.
Satta Watson, une Libérienne qui a vécu l’épidémie,
décrivait sa pensée en ces termes :
« J’entendais des gens me dire que ce qui se passait
n’était pas le virus Ebola, mais peu importe ce que c’était, il a été créé dans
des laboratoires pour tenter de tuer des Libériens.
Que c’était une façon pour le gouvernement d’obtenir de
l’argent de l’Organisation mondiale de la santé afin de le mettre ensuite dans
ses poches. »
Au lieu d’aller se
faire soigner, les malades ignoraient leurs symptômes et refusaient de demander
de l’aide médicale.
La corruption systématique a provoqué un manque de
confiance envers le gouvernement libérien.
Cette méfiance a incité les patients à ne pas prendre
leur santé au sérieux, ce qui a aggravé la crise.
La corruption empêche non seulement les dons d’atteindre les
patients, mais elle peut également empêcher les patients de se manifester.
UN FACTEUR DE
RISQUE POUR LA SANTÉ PUBLIQUE
Davantage de responsabilité serait sûrement plus efficace
que davantage d’argent.
C’est d’ailleurs bien expliqué dans le magazine Foreign
Policy :
« Il existe un lien évident entre cet échec de la
gouvernance et la crise sanitaire actuelle.
Dans les endroits où les gouvernements sont si rarement
disposés ou capables [d’agir] dans l’intérêt de leurs citoyens, nous pouvons
commencer à comprendre pourquoi l’épidémie continue de se propager.
Les services de santé, qui existent à peine dans de
nombreux endroits, sont boudés parce que les conditions insalubres des hôpitaux
et des centres de santé en font des plaques tournantes pour la propagation du
virus.
De nombreux membres du personnel hospitalier – déjà
sous-payés et mal équipés – sont devenus eux-mêmes des victimes.
Les agents de santé étrangers envoyés pour aider, sont
ignorés et même chassés par des habitants effrayés. »
Bien que la politique et le domaine médical puissent
sembler sans lien, l’épidémie d’Ebola a révélé à quel point ces deux domaines
sont interconnectés et à quel point la corruption et la méfiance peuvent avoir
un impact considérable sur les soins médicaux.
Quelles leçons pouvons-nous tirer de la lutte contre
Ebola ?
Le professeur Taryn Vian est parvenu à la conclusion
suivante :
« S’il existe un enseignement au sujet de la corruption
que nous pouvons tirer de l’épidémie d’Ebola, c’est que : la corruption est un
facteur de risque pour la santé publique.
Les pratiques de corruption dans le secteur de la santé
réduisent les ressources dont nous disposons pour faire face aux épidémies
telles qu’Ebola.
Cela affaiblit également la confiance du public dans les
systèmes de santé du gouvernement, confiance sur laquelle nous devons compter
dans les situations d’urgence.
Les stratégies de lutte contre la corruption peuvent
renforcer les systèmes de santé publique et les réseaux d’intervention afin
qu’ils soient prêts lorsque nous en avons besoin. »
Parlant de la corruption, cela me brise le cœur
d’apprendre que des gouvernements se livrent à des comportements prédateurs et
exploitent leurs propres peuples.
Cela se produit surtout dans le domaine de la santé
publique, où la vie des gens est en jeu.
Combien de morts auraient pu être évitées avec l’aide
volée à la Croix-Rouge d’une valeur de 5 millions de dollars ?
La corruption et la fraude se produisent aussi parfois
lors de campagnes de collecte de fonds moins importantes.
Comme le signale
le New Jersey Advance, un couple du sud du New Jersey a été accusé d’avoir
collecté frauduleusement plus de 400 000 dollars pour un ancien combattant sans
abri et de ne jamais le lui avoir donné.
Parmi les autres scandales sur GoFundMe figurent des
mères simulant le cancer d’un enfant et des personnes prétendant faussement
avoir une maladie du cerveau.
Un homme a même battu son propre chiot pour collecter 14
000 dollars en vue d’une chirurgie d’urgence.
Les escroqueries
ne sont pas nouvelles, mais Internet a créé encore plus d’opportunités de
corruption.
Lorsque vous donnez de l’argent, il est important de vérifier
qu’il va au bon endroit et qu’il est dépensé efficacement.
Après tout, les dons ne servent à rien si le système de
leur gestion est corrompu.
- Catherie Alles est analyste pour Foundation of Economic
Education – Article initialement publié en anglais par la Foundation of
Economic Education – Traduction réalisée par Libre Afrique.
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