18/10/2019 -
La Turquie va mettre fin à son offensive en Syrie après un
retrait des forces kurdes, a annoncé jeudi le vice-président américain Mike
Pence à Ankara.
Pour permettre un retrait des forces kurdes « sous 120
heures, toutes les opérations militaires dans le cadre de l'opération Source de
paix vont être suspendues et l'opération sera complètement arrêtée une fois ce
retrait achevée », a déclaré Mike Pence à la presse à l'issue de plus de quatre
heures d'entretiens avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Recep Tayyip Erdogan et Mike Pence, ce jeudi à Ankara
(Turquie). REUTERS/Huseyin Aldemir
Les forces kurdes
devront se retirer d'un secteur d'une profondeur de 32 km censé se transformer
à terme en « zone de sécurité ».
Le chef de la diplomatie turque Mevlut Cavusoglu a
confirmé cet accord.
Vidéo
« Nous suspendons l'opération, nous ne l'arrêtons pas »,
a-t-il déclaré à la presse.
« Nous pourrons arrêter l'opération seulement lorsque les
forces kurdes se seront retirées complètement de la région », a-t-il ajouté.
Le 17 octobre 2019, Mike Pence, vice-président
américain, assiste à une conférence de presse à l'ambassade américaine à
Ankara, en Turquie. Adem ALTAN / AFP
Les Occidentaux soutiennent les YPG (une composante de la
milice syrienne) pour leur rôle crucial dans la lutte contre les djihadistes du
groupe État islamique (EI), mais Ankara les qualifie de « terroristes » en
raison de leurs liens avec le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), qui
mène une guérilla sanglante en Turquie depuis 1984.
Donald Trump avait paru donner son feu vert à
l'offensive, avant, face au tollé dans les pays occidentaux et au sein de son
camp, d'exhorter Ankara à y mettre fin et d'autoriser des sanctions contre la
Turquie.
Mike Pence a annoncé que ces sanctions seraient levées
lorsque la Turquie aura mis fin à l'offensive conformément à l'accord conclu
jeudi.
Il faut bien l’avouer : sous des postures de type
télé-réalité, le président Trump, parfois, inquiète même ses observateurs
intéressés.
Puis, à la réflexion, on réalise qu’il y avait quelque
chose à comprendre.
Trump veut trois choses qu’aucun de ses prédécesseurs ne
voulait ou n’a su faire avant lui :
- ne plus envoyer les fils de l’Amérique se faire tuer
pour les lobbies de la guerre aux quatre parallèles du monde et réduire le coût
de l’OTAN ;
- empêcher l’Iran d’acquérir la bombe et de diffuser son
djihad chiite en Afghanistan, Bahrein, Irak, Liban, Palestine, Syrie, Yémen ;
- maîtriser la mondialisation multilatérale et,
notamment, la pression commerciale des Chinois.
Ne pas avoir cela
à l’esprit c’est s’exposer à ne rien comprendre à la nouvelle politique
américaine, sur fond de résistance des lobbies de « l’État profond » (deep
state) yankee.
France Inter s’est exposé à ce danger en titrant, ce 16
octobre : « Donald Trump, apprenti sorcier de la diplomatie ».
La critique porte essentiellement sur « sa décision de
retirer ses troupes de Syrie […] aux conséquences […] désastreuses […] le
résultat d’un fonctionnement instinctif critiqué y compris chez les
Républicains ».
Le journaliste éclaire à sa façon la politique étrangère
de Donald Trump, ses « décisions […] qui ont fait trembler la planète.
Quand il a quitté l’accord nucléaire avec l’Iran […] ou
quand il a déplacé l’ambassade américaine à Jérusalem […] ou encore […] a
entamé cette amitié improbable avec le dictateur nord-coréen Kim Jong-un ».
Tout ce vocabulaire choisi fausse l’analyse mais il n’est
pas utile de perdre son temps sur ces sujets dont la présentation est biaisée
par les mots utilisés.
Donald Trump avait
annoncé qu’il ferait rentrer les boys à la maison : il le fait, et ce sont ceux
qui ont le plus critiqué les USA de s’être mêlés de tous les conflits du monde
qui lui reprochent, à présent, de s’en retirer…
Ce journaliste vraiment « très bien informé » sait que «
les événements qui se déroulent dans le nord de la Syrie […] prennent leur
origine directe dans un coup de fil entre Donald Trump et le président turc
Recep Tayyip Erdoğan ».
Or, il y a une
autre explication : Donald Trump a vite compris que l’assaut donné à la Syrie
par cet allié désormais aussi peu fiable que dangereux qu’est la Turquie
d’Erdoğan (un Frère musulman dictatorial qui rêve de reconstituer l’Empire
ottoman) se heurtera non seulement aux Kurdes syriens, plutôt gauchistes, mais
aussi à l’armée syrienne très aguerrie, et surtout à la Russie.
Dans cette
affaire, il n’y aura que des « vainqueurs » :
- Erdoğan dira qu’il
a établi une zone de sécurité anti-YPG/PYD kurde à sa frontière sud-ouest ;
-Trump dira qu’il
a retiré ses soldats mais qu’il n’y a pas eu de génocide kurde ; -
- El-Assad dira
qu’il a stoppé l’avance turque,
- et la Russie de
dira rien – comme souvent – mais comptera les points de sa remarquable réussite
stratégique : elle gardera ses quatre bases navales et aériennes en
Méditerranée.
Des médias superficiels se sont dits surpris du virage à
180° effectué par les Kurdes de Syrie du fait de leur rapprochement si rapide
avec El-Assad, alors que leur relative autonomie était le fruit d’un accord
très officiel avec Damas, pour prix de leur engagement contre les islamistes.
Qualifier, comme le fait France Inter, Donald Trump de «
président encombrant et dysfonctionnel », peut-être un jour destitué, est aller
bien vite en besogne et passer sous
silence le vrai problème de notre Président à nous, Français : celui des neuf
postes français (dont huit décidés par Emmanuel Macron) pris au piège du nord
syrien, selon l’agence de presse turque Anadolu, et qu’il aurait fallu dégager
depuis trois semaines à la fin de leur mission officielle contre Daech.
Par Henri Temple
Universitaire, juri-économiste, expert international,
dialecticien
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