Inrap – 09/10/2019.
Aux portes de Narbonne, jouxtant le musée archéologique
de Narbo Via, une nécropole antique est actuellement fouillée par l'Inrap.
Exceptionnelle par son état de conservation et par le nombre et la diversité de
ses structures funéraires, elle s'impose déjà comme le site de référence pour
l’étude des pratiques funéraires en Gaule romaine.
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Dalle funéraire avec épitaphe - Denis Gliksman, Inrap
Aux portes de Narbonne, une nécropole antique est
actuellement fouillée par une équipe de l’Inrap, sur prescription de l’État
(Drac Occitanie), en préalable à l’aménagement d’un nouveau quartier.
Bouteilles en verre, trouvées avec les restes osseux
brûlés d'un défunt dans un coffre en pierre - Denis Gliksman, Inrap
NARBONNE, TERRE
ROMAINE
À l’issue de la conquête romaine de 125 avant notre ère,
la ville est la première colonie de Rome implantée en Gaule.
Vase balsamaire (flacon à parfum). Il était
fréquemment utilisé dans les rites funéraires romains. Denis Gliksman, Inrap
Un siècle plus tard, Auguste fait de Narbo Martius la
capitale de la province de Narbonnaise qui s’étend de Fréjus à Toulouse et aux
Pyrénées et de la Méditerranée à Vienne et à Genève.
Pendeloque représentant un phallus, à usage
probablement prophylactique
Denis Gliksman, Inrap
Narbonne est aussi dans l’Antiquité un centre économique
florissant, l’un des plus grands ports de Méditerranée occidentale, situé à un
carrefour de voies terrestres, fluviales et maritimes
Cruches en céramique trouvées dans les sépultures.
Elles témoignent de l'importance des offrandes liquides et étaient parfois
déposées à l'envers dans les tombes. Denis Gliksman, Inrap
. À 600 m à l’est de la ville antique, au croisement de
deux voies, l’espace funéraire, occupait 2000 m2 entre les Ier et IIe siècles
de notre ère. Près de 300 tombes y ont été repérées sur le millier estimé.
Dalle funéraire avec épitaphe - Denis Gliksman, Inrap
LA NÉCROPOLE
Fouille d'enclos maçonnés de la sépulture antique de
Narbonne - Denis Gliksman, Inrap
La nécropole est structurée par des enclos maçonnés,
implantés selon un parcellaire régulier.
Monument funéraire en cours de fouille - Denis
Gliksman, Inrap
Ceux-ci permettent de discerner des groupes distincts
dont il est possible de comparer les pratiques respectives.
Conduit à libation (alimentant un vase ossuaire) sur
une tombe à coffrage de tuile
Denis Gliksman, Inrap
Ces concessions, accolées, parfois séparées par des
chemins de desserte, présentent des petits monuments ornés d’enduits peints.
Des plaques peuvent être apposées sur les monuments.
Monument funéraire en cours de fouille - Denis
Gliksman, Inrap
Leurs épitaphes documentent les couches les plus modestes
de la plèbe urbaine (esclaves ou affranchis) d’origine essentiellement
italienne ; elles témoignent également de la prospérité économique de ces
milieux plébéiens.
Cruches et vase à parfum en verre sur les ossements
brûlés du défunt
Denis Gliksman, Inrap
Les sépultures sont majoritairement des crémations : sont
présents de nombreux bûchers et des tombes simples – souvent protégées par une
couverture ou un coffrage de tuiles.
Vase ossuaire avec cruche dans une tombe en coffrage -
Denis Gliksman, Inrap
La sépulture comporte les ossements brûlés placés dans un
contenant accompagné d’un dépôt de cruches en verre ou en céramique, parfois
associées à des vases à parfum et des lampes.
Ces récipients témoignent de l’importance des offrandes
de liquides (de vin ?) et de parfum en l’honneur du défunt.
Des fruits carbonisés (notamment des dattes et des
figues), des objets personnels (objets de parure, de toilette…) sont également
présents dans les cendres des bûchers.
Vidéo
UN SITE
EXCEPTIONNELLEMENT CONSERVÉ
La proximité d’un bras de l’Aude (aujourd’hui canal de la
Robine) explique l'état de conservation exceptionnel des vestiges
archéologiques.
Le site était protégé par 3 m de limons issus de ses
crues.
De plus, des inondations récurrentes durant l’Antiquité
ont scellé les états successifs de la nécropole et permettent de percevoir les
phases d'évolution des pratiques funéraires et des cultes commémoratifs.
AU CŒUR DES
RITUELS FUNÉRAIRES
L’état de conservation des vestiges permet pour une fois
d’appréhender certains gestes rituels ; au moment des funérailles, sur le
bûcher ou dans la tombe ; mais aussi dans le cadre du culte mémoriel, au
travers d’offrandes en l’honneur des défunts ou de repas consommés dans les
enclos.
Rarement attesté en Gaule, l’usage de conduits à libation
concerne une tombe sur trois à Narbonne.
Dépassant du sol, ces conduits sont des céramiques,
parfois des amphores, enfoncées dans la tombe pour arriver au plus près du
défunt. Ils permettaient d’y introduire des offrandes.
Certains renferment encore des coupelles ayant servi aux
libations et des coquillages.
Des analyses de chimie organique sont en cours en vue de
mieux caractériser ces pratiques libatoires.
La diversité des structures funéraires, leur état de
conservation, la superposition des sols et des tombes font de ce site un cas
unique en Gaule, dont les éléments de comparaison se trouvent en Italie,
notamment à Pompéi ou à Rome.
Offrant la rare possibilité d’appréhender les pratiques
funéraires dans le temps et dans l’espace, la nécropole de Narbonne apparaît
d’ores et déjà comme la référence pour l’étude des pratiques funéraires en
Gaule romaine, mais aussi pour la connaissance de la plèbe durant l’Antiquité.
Par son importance et son exceptionnel état de
conservation, ce site est une découverte majeure pour l’archéologie française
et bénéficie d’un important financement public, de la mobilisation des
collectivités (État : 2,8 millions d’euros ; Région Occitanie Occitanie /
Pyrénées-Méditerranée : 800 000 euros ; département de l’Aude : 300 000 euros ;
agglomération du Grand Narbonne : 800 000 euros ; Ville de Narbonne : 800 000
euros) et du maître d’ouvrage du projet (Alenis, société d’aménagement du Grand
Narbonne : 750 000 euros).
Le site est à proximité immédiate du musée archéologique
Narbo Via qui, dès 2020, présentera sur 8 000 m² le patrimoine et le récit
exceptionnel de la Narbonne antique (conception : « Foster+Partners » ;
maîtrise d’ouvrage : Région Occitanie).
Aménagement : Alenis
Contrôle scientifique :
Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique :
Inrap
Responsable scientifique :
Valérie Bel, Inrap
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